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---------- toute l’intelligence est dans la trompette ---------- l'information déployée par Jean-claude Barthelay ---------j'ai été enfant de choeur, militant socialiste, pilier de bar, artisan du batiment, conseiller municipal, sportif ( course à pied, alpinisme ) et touriste à Chamonix, c'est dire si j'en ai entendu des conneries...........................
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dimanche 29 mai 2016
MIGRANTS !
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Réfugiés : mais pourquoi diable viennent-ils chez nous ?
Par Le Partageux le 08 avril 2016, 08:41 - Les bafouilles du Partageux
Irak et Syrie. Vends appartements dans tous les quartiers de Homs (photo) et nombreuses autres villes. Petit prix. Prévoir travaux. Nombreuses photos sur demande auprès de votre moteur de recherche.
Afghanistan. Plus de onze mille civils tués ou blessés en 2015. Pour avoir l’équivalent en France, il aurait fallu que les divers attentats que nous avons connu en 2015 aient fait… 23 500 victimes. Source.
Érythrée. Un pays gouverné par un régime sympathique dont l’armée, parmi bien d’autres distractions, abat des jeunes conscrits. Les civils blessés et le gosse tué sont des dommages collatéraux. Source.
Soudan du sud. La famine y atteint des niveaux alarmants. Les prix des produits alimentaires sont très élevés. Des dizaines de milliers de morts à venir selon les organisations humanitaires. Source.
Koweit. Les Bidoun, les « sans », comprendre les citoyens apatrides sans papier, sont une spécificité de divers pays du Moyen-Orient. Au Koweit ils n’ont pas le droit de travailler officiellement, sont interdits de séjour dans les hôpitaux et les écoles parmi d’autres vexations. Source.
Iran. Restrictions sévères à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Journalistes, défenseurs des droits humains et syndicalistes arrêtés et emprisonnés. Recours à la torture répandu. Les femmes et les minorités ethniques et religieuses souffrent de discrimination généralisée. Les homosexuels sont accusés de vols ou viols et exécutés. Des condamnés ont été rendus aveugles, amputés ou fouettés. Neuf-cent-soixante-dix-sept condamnations à mort en 2015. Source.
Turquie. Le gouvernement fait la guerre à sa population dans le Kurdistan turc. Quarante morts par arme chimique à Yüksekova, 80% des habitations détruites par des tirs de chars à Cizre, trente-et-un morts dans un sous-sol d’immeuble, on ne sait quel exemple choisir parmi toutes les nouvelles deKedistan, un site d’information en français. Et, si tu n’es pas encore convaincu de la future arrivée massive de réfugiés kurdes de Turquie, il faut lire et regarder ce reportage sur la destruction des villes kurdes.
VERDUN // MASSACRE FUTILE DE PAUVRES IDIOTS POUR LE BENEFICE DES RICHES // UN VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT ......
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Voyage au bout de la nuit de Louis Ferdinand Céline
- Résumé du roman
- Quelques critiques de Voyage au bout de la nuit
- Premières et dernières phrases de Voyage au bout de la nuit
- Quelques citations de Voyage au bout de la nuit
Résumé du roman
Paris, place de Clichy, 1914. Envoûté par la musique d'une parade militaire, Ferdinand Bardamu, jeune rebelle, décide, par excès d'héroïsme, de s'engager dans la guerre contre les Allemands. Mais au front, c'est l'enfer et l'absurdité. Il perd vite son enthousiasme et découvre avec épouvante les horreurs de la guerre. Il ne comprend plus pourquoi il doit tirer sur les Allemands. Il prend aussi conscience de sa propre lâcheté.
On lui confie une mission de reconnaissance. Lors d'une nuit d'errance, il rencontre un réserviste nommé Robinson qui cherche à déserter. Ils envisagent de s'enfuir, mais leur tentative échoue. Blessé, traumatisé à jamais par la guerre, Bardamu revient à Paris pour être soigné. On lui remet une médaille militaire. Lors de cette cérémonie, il fait la connaissance de Lola, une jeune et jolie infirmière américaine. Bardamu est soigné dans différents hôpitaux. Il prend conscience des avantages et profits que tirent de la guerre tous ceux qui y ont échappé.
Lola, compagne futile et légère, le quitte. Il rencontre alors Musyne, une jeune violoniste. Ils ont une aventure, mais, un jour de bombardement, elle l'abandonne.
Réformé, Bardamu décide de partir pour l'Afrique. Il y découvre les horreurs de l'exploitation coloniale. Il retrouve Robinson, rencontré sur les champs de bataille, et lui succède en reprenant la gérance d'un comptoir commercial. Il tombe malade et connaît des crises de délire.
Il quitte l'Afrique à demi-mort à bord d'un bâtiment espagnol qui a tout d'une galère. Ce bateau l'emmène jusqu'à New-York . Dès son arrivée, il est placé en quarantaine . Dans cette ville à laquelle, il a tant rêvé, il ne connaît que solitude et pauvreté. Il part à Détroit pour y travailler. Il rencontre Molly, une prostituée généreuse qui le délivre de l'enfer de l'usine Ford . Molly aime Bardamu , l'entretient et lui propose de partager son bonheur. Mais son désir d'explorer plus avant l'existence le pousse à renoncer à cette femme généreuse. Il quitte les Etats-Unis et revient à Paris. Il rentre le cœur gonflé et meurtri par toutes ces expériences.
Devenu médecin , mais menant une existence toujours aussi misérable, il s'installe à Rancy, banlieue triste et pauvre. Il y découvre les côtés les plus répugnants et les plus désespérants de la condition humaine. Il assiste impuissant à la mort de Bébert, un petit garçon qu'il aimait bien et que la science ne peut sauver. Puis il se retrouvé mêlé à une sordide histoire. Une famille de sa clientèle, les Henrouille, souhaitent se débarrasser de leur mère âgée. Ils font appel à Robinson qui accepte de tuer la vieille dame pour dix mille francs. Mais par maladresse, Robinson échoue et se blesse. Il perd provisoirement la vue. Bardamu soigne Robinson qui part ensuite s'exiler à Toulouse en compagnie de la mère Henrouille, sa victime rescapée.
Bardamu quitte Rançy et abandonne la médecine. Il devient figurant dans un spectacle de danse. Il se rend ensuite à Toulouse et retrouve Robinson. Il fait la connaissance de Madelon , sa fiancée et devient son amant. Il fait visiter avec la mère Henrouille un caveau plein de cadavres à des touristes. Mais la vieille dame tombe dans l'escalier, vraisemblablement poussée par Bardamu, et se tue. Robinson incite son compère à regagner Paris.
Il est engagé comme médecin dans un établissement psychiatrique dont le patron est le docteur Baryton. Les deux hommes sympathisent.
Rapidement, Baryton sombre dans la folie et annonce à Bardamu sa décision de partir : " je vais renaître, Ferdinand." Il confie à Bardamu la direction de la clinique. Robinson reparaît au grand regret de son ami. Il a recouvré la vue et a quitté Madelon. Bardamu le cache dans sa clinique pour le soustraire à Madelon qui, amoureuse, le poursuit. Sophie, une superbe infirmière slovaque, qui est devenue la maîtresse de Bardamu, prêche pour la réconciliation entre Robinson et Madelon. Bardamu propose une sortie à la fête des Batignolles afin de réconcilier tout le monde. Robinson refuse les avances de Madelon dans le taxi et avoue son dégoût des grands sentiments Madelon le tue de trois coups de revolver. Après l'agonie de Robinson, Bardamu se retrouve seul en bordure d'un canal. Un remorqueur siffle au loin comme s'il souhaitait emmener avec lui tout ce qui existe : " tout , qu'on n'en parle plus."
Quelques critiques de Voyage au bout de la nuit
Il faut relire Céline en le voyant. Céline a dit la vérité du siècle : ce qui est là est là , irréfutable, débile, monstrueux, rarement dansant et vivable.
Philippe Sollers in Céline, Voyage au bout de la Nuit, Gallimard
Saisissante épopée de la révolte et du dégoût , long cauchemar visionnaire ruisselant d'invention verbale , et dominé par l'inoubliable figure de Bardamu, Le Voyage a exercé une action considérable . Céline fut l'un des premiers à vivre ce dont la littérature actuelle allait bientôt se nourrir presque exclusivement : l'absurdité de la vie humaine.
Gaëtan Picon, Panorama de la Nouvelle littérature française, Gallimard, 1976
Pour nous la question n'est pas de savoir si la peinture de M. Céline est atroce, nous demandons si elle est vraie. Elle l'est. Et plus vrai encore que la peinture , ce langage inouï, comble du naturel et de l'artifice, inventé, créé de toutes pièces à l'exemple de la tragédie , aussi loin que possible d'une reproduction servile du langage des misérables, mais fait justement pour exprimer ce que le langage des misérables ne saura jamais exprimer, la sombre enfance des misérables.
Bernanos, Le Figaro, décembre 1932
Le style de Céline est subordonné à sa perception du monde. A travers ce style rapide qui semblerait négligé, incorrect, passionné, vit, jaillit et palpite la réelle richesse de la culture française, l'expérience affective et intellectuelle d'une grande nation dans toute sa richesse et ses plus fines nuances. Et, en même temps, Céline écrit comme s'il était le premier à se colleter avec le langage. L'artiste secoue de fond en comble le vocabulaire de la littérature française.
Léon Trotski, Littérature et révolution
Premières et dernières phrases de Voyage au bout de la nuit
Début du roman
" ça a débuté comme ça. Moi , j'avais jamais rien dit. Rien. C'est Arthur Ganate qui m'a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin lui aussi, un camarade...."
Fin du roman
" De loin, le remorqueur a sifflé ; son appel a passé le pont, encore une arche, une autre, l'écluse, un autre pont, loin, plus loin... Il appelait vers lui toutes les péniches du fleuve toutes, et la ville entière, et le ciel et la campagne, et nous, tout qu'il emmenait, la Seine aussi, tout, qu'on n'en parle plus. "
Quelques citations de Voyage au bout de la nuit
L'amour, c'est l'infini à la portée des caniches.
Quand on a pas d'imagination, mourir c'est peu de chose, quand on en a, mourir c'est trop.
Le cinéma, ce nouveau petit salarié de nos rêves on peut l'acheter lui, se le procurer pour une heure ou deux, comme un prostitué.
Faire confiance aux hommes, c'est déjà se faire tuer un peu.
On n'est jamais très mécontent qu'un adulte s'en aille, ça fait toujours une vache de moins sur la terre, qu'on se dit, tandis que pour un enfant, c'est tout de même moins sûr. Il y a l'avenir.
samedi 28 mai 2016
mardi 24 mai 2016
QUE FAISAIT LA FRANCE EN INDOCHINE ? QUE FAISAIT LA FRANCE EN ALGERIE ? -- Simone De Bollardière --
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Source : L’Humanité, Jean-Paul Monferran, 10-11-2000
Guerre d’Algérie. Entretien avec l’une des signataires de l’appel contre la torture, dont le mari fut le premier officier supérieur à en dénoncer l’usage.
En mars 1957, le général de parachutistes Jacques Pâris de Bollardière – quarante-neuf ans, résistant de la première heure, soldat le plus décoré de la France libre – demande à être relevé de son commandement en Algérie. Il refuse la torture, au nom de ” l’effroyable danger qu’il y aurait à perdre de vue […] les valeurs morales qui, seules, ont fait jusqu’à présent la grandeur de notre civilisation et de notre armée “. Publiée dans l’Express de Jean-Jacques Servan-Schreiber, sa lettre fait grand bruit et lui vaut soixante jours de forteresse. ” Il avait sa conscience pour lui “, et ce temps de détention, ” il l’a mis à profit pour lire, surtout les philosophes “, explique aujourd’hui Simone de Bollardière, sa veuve, qui, ” pour la mémoire du combat de son mari ” et au nom de leur éthique commune, a décidé d’être l’une des douze signataires de l’appel ” à condamner la torture durant la guerre d’Algérie “. Rencontre avec une vieille dame digne, qui appelle un chat un chat…
Dans quelles circonstances avez-vous décidé d’être l’une des signataires de cet appel ?
Simone de Bollardière. Lorsque j’ai été contactée par Charles Silvestre, de l’Humanité, j’ai tout de suite été d’accord pour signer ce texte, surtout quand j’ai vu le nom des autres personnes, que je connais, pour certaines, et que mon mari connaissait aussi. Je me suis dit, sans trop y croire : ” Pourquoi ne pas jeter encore une bouteille à la mer ? ” J’ai donc signé – et pour plusieurs raisons. Tout récemment, j’ai vu le film Warrior, qui montre de jeunes Anglais se retrouvant en Yougoslavie sans y avoir été préparés et qui reviennent totalement chamboulés au bout de six mois, simplement à la vue des horreurs de la guerre. Or, la France, dans le plus grand secret, et sans jamais parler de ” guerre “, a envoyé en Algérie, pendant deux ans et demi, des jeunes de vingt ou vingt-deux ans, qui ont participé à des abominations. Certains ont vu leurs camarades morts, éventrés, et autres choses atroces, mais, eux aussi, ont commis des actes abominables, avec l’autorisation – non dite et non écrite – des autorités, et l’obligation, pour certains, de le faire, sous peine d’être méprisés par des officiers qui sortaient à peine de la guerre d’Indochine. Toute une génération a été sabordée par la guerre d’Algérie : la plupart se sont réfugiés ensuite dans le silence, beaucoup se sont suicidés ou sont devenus alcooliques…
Dans quelles conditions votre mari a-t-il décidé de refuser la torture ?
Simone de Bollardière. Dès que les ordres ont commencé à arriver dans son secteur. Mon mari – vous l’avez mentionné – était le soldat le plus décoré de la France libre. Il a alors écrit – sans permission, mais on n’était pas à l’école maternelle – que la torture était une pratique inadmissible, qui plus est, inefficace. Cela lui a valu deux mois de forteresse, et le reste de l’armée lui a tourné le dos. Ce qui m’a toujours étonnée, c’est que des généraux, des officiers supérieurs, qui se disaient ” bons pères de famille ” et qui, paraît-il, n’auraient pas fait de mal à une mouche, n’aient pas eu alors l’idée que si ce général-là, avec le passé qu’il avait (compagnon de la Libération, deux fois titulaire de la plus haute distinction britannique, etc.) posait une question de cette importance, c’est qu’il y avait un problème que, eux, systématiquement, refusaient de voir en disant : ” Dans mon secteur, il n’y a pas de torture “.
Comment l’expliquez-vous ?
Simone de Bollardière. Je ne l’explique pas.
Comment expliquez-vous alors l’attitude singulière du général de Bollardière, l’un des premiers officiers à rejoindre le général de Gaulle à Londres, en juin 1940 ?
Simone de Bollardière. Permettez-moi d’abord de dire les choses autrement : quand mon mari, alors capitaine, est arrivé à Londres en juin 1940, il ne savait pas qu’il y avait de Gaulle. Il revenait de Norvège, il a pris un bateau en Bretagne, et il comptait poursuivre la guerre comme simple soldat dans l’armée britannique pour combattre les nazis – il n’a jamais dit contre ” les Allemands “. C’est alors qu’il a appris l’existence de de Gaulle… Pour répondre à votre question, je crois que l’expérience de mon mari dans les maquis de la Résistance a beaucoup compté, tout comme sa formation et ses convictions de jeunesse : pour lui, un homme était toujours un homme ; on n’avait pas le droit de faire n’importe quoi à un autre homme, quelles que soient les circonstances. Il m’a raconté que, blessé dans les Ardennes, il avait mis toute son énergie à éviter que deux prisonniers allemands ne soient sommairement exécutés. Ils n’ont finalement été ni fusillés ni martyrisés, et ce sont eux qui l’ont porté sur un brancard pendant plusieurs jours… Il s’est toujours référé à des valeurs morales, au respect de l’autre, à l’éthique chrétienne : ” Tu ne feras pas aux autres “, etc.
Vous savez que, de manière récurrente, se pose, s’agissant de l’Algérie, la question des responsabilités respectives de l’armée et du pouvoir politique
Simone de Bollardière. Le pouvoir civil a été nul : il n’y a eu personne de courageux, pas plus Guy Mollet qu’un autre, personne qui ose dire autre chose que : ” Ce sont les événements d’Algérie “, etc. Quant aux officiers, ils n’avaient en tête que de prendre une ” revanche ” sur l’Indochine. Tout à leur mépris pour les ” Viets ” – comme ils disaient – ils n’avaient rien compris à ce qui s’était passé à Dien Bien Phu. Ils sortaient des ” écoles de guerre “, ils ne pensaient jamais pouvoir être défaits par des gens qui n’avaient que des bicyclettes. La vraie question est : que faisait la France en Indochine, que faisait la France en Algérie ?.
Quels souvenirs gardez-vous de la mise en détention de votre mari ?
Simone de Bollardière. Lui avait sa conscience pour lui : il était bien dans sa peau, il avait le temps de lire, surtout les philosophes, et en particulier Alain, dont il avait été l’élève. Moi, j’ai vécu cela comme une immense injustice – qui m’a, je crois, rendue pour toujours hypersensible à toute injustice, et par exemple, aujourd’hui, au sort des sans-papiers… Je ne supportais pas d’entendre mon mari être traité de ” salaud “, d’homme qui ” avait sali l’honneur de l’armée “, etc. En fait, c’est lui, seul, qui a sauvé alors ” l’honneur de l’armée “… Permettez-moi d’ajouter deux choses, encore plus personnelles : j’ai été très émue à la lecture du témoignage de cette jeune Algérienne qui expliquait que, quelque temps avant d’être torturée, elle avait écouté avec son père une émission, dans laquelle on parlait d’un général qui s’était opposé à la torture, et qu’ils avaient pleuré. Par ailleurs, j’ai toujours été sensible au fait que les Algériens ont toujours su dire, sans l’écorcher, le nom de mon mari ; en France, ce n’est pas le cas, on dit couramment ” La Bollardière “, ou je ne sais quoi… Au fond, j’en suis fière. Il n’y a rien de plus important que d’avoir sa conscience pour soi, de pouvoir se regarder dans la glace chaque matin…
J’imagine que vous avez beaucoup discuté ensemble de la guerre elle-même, du fait de savoir s’il fallait la faire ou non…
Simone de Bollardière. Il ne fallait pas la faire. L’Algérie, c’était le non-droit absolu pour les Algériens, et, dès qu’il y avait ne serait-ce qu’une petite ” réforme ” d’envisagée, les pieds-noirs riches s’y opposaient. Il y avait un mépris total pour l’existence de plus de 80 % de la population… Après l’Indochine, ne croyez-vous pas que des leçons auraient pu être tirées ? Quand nous étions en Indochine avec mon mari, j’allais dans les hôpitaux : il y avait des Algériens, des Marocains, des Africains, que l’on envoyait se battre ” pour la France ” en Indochine, quand eux-mêmes étaient venus nous aider à nous libérer de l’occupant nazi. Il ne faut pas mépriser les gens à ce point : les Algériens, par exemple, ont bien vu le rôle qu’on leur faisait jouer en Indochine, la ” sale guerre ” à laquelle ils étaient contraints. Quand ils sont revenus en Algérie, ils se sont dits : ” Pourquoi, nous aussi, n’aurions-nous pas notre indépendance ? Nous avons aidé les Français à reconquérir leur indépendance contre Hitler, pourquoi n’obtiendrions-nous pas la même chose ? ” C’est un raisonnement logique. Dans l’Évangile, on parle d’un ” peuple à la nuque raide ” : les Français, eux, ont eu la nuque plus que raide. Ils n’ont jamais voulu comprendre – et peut-être encore beaucoup aujourd’hui…
La torture était partout présente ?
Simone de Bollardière. Partout. C’était systématique. Et – je le répète – cela a détruit toute une génération.
La torture a été pratiquée aussi du côté algérien.
Simone de Bollardière. Un pays qui obtient sa liberté et son indépendance dans une violence pareille – avec l’OAS, les barbouzes, les anti-barbouzes, les hommes, les femmes, les enfants tués, massacrés, n’importe où, n’importe quand, n’importe comment – c’est un peuple qui se constitue dans la violence et qui se continue dans la violence. La violence en Algérie, c’est la suite de la guerre d’Algérie – c’est le dominant qui contamine la dominé. La France, vous savez, ce n’est pas très joli… Regardez encore aujourd’hui comment on traite les sans-papiers, comment des formes de torture peuvent encore être pratiquées dans les commissariats. La guerre d’Algérie a généré beaucoup de gangrène : du fait qu’il n’y a pas eu de sanctions, que tout a été toujours caché, qu’il y a eu l’amnistie, que l’on ne peut même pas en parler… Si je dis que Le Pen est un tortionnaire, je n’en ai pas le droit !.
On a beaucoup écrit sur les rapports entre votre mari et le général de Gaulle à cette époque.
Simone de Bollardière. Mon mari n’avait pas de rapports avec le général de Gaulle. Il s’est trouvé ” gaulliste ” parce que de Gaulle était là en 1940. Quant au retour au pouvoir de de Gaulle en 1958, on ne peut pas dire qu’il l’ait apprécié. Lorsqu’il a voulu quitter l’armée – et se disant que de Gaulle avait tout de même représenté quelque chose de très fort, d’essentiel – il lui a demandé audience. De Gaulle lui a dit : ” Que voulez-vous ? ” Mais mon mari ne voulait rien : ni étoile ni poste… Il voulait seulement parler de la situation en Algérie, lui demander ce qu’il comptait faire. Mon mari m’a dit : ” J’ai eu l’impression que nous n’étions pas dans le même monde. ” Il a pris sa retraite après le putsch de 1961, et il s’est occupé, ici en Bretagne, de formation pour les personnes en grande difficulté. Pour remettre le monde un petit peu plus à l’endroit.
C’est tout de même un parcours original ?
Simone de Bollardière. Oui, mais il suit une ligne très droite. Pendant longtemps. Il a écrit : ” J’ai cru que, pour la libération de l’homme, il fallait faire la guerre. Donc, je l’ai faite. Maintenant, je continue pour la libération de l’homme avec d’autres moyens : c’est-à-dire l’éducation et la formation à la non-violence. “.
Comment avez-vous apprécié la déclaration de Lionel Jospin s’engageant à poursuivre le ” travail de vérité ” sur la guerre d’Algérie ?
Simone de Bollardière. J’ai signé ce texte – je crois l’avoir déjà dit – à la fois par amitié pour l’Humanité – que je ne me représente pas avec un couteau entre les dents ! – et lorsque j’ai su qui étaient les autres signataires qui, tous, sont des personnes d’une très haute valeur morale. Dès lors, je me suis sentie moralement obligée à cause de mon mari. Mais, pour dire la vérité, je n’attendais rien de cet appel. Depuis tout ce temps… Tout paraissait tellement bloqué… Aussi, ma stupéfaction a été totale lorsque j’ai pris connaissance de la déclaration de Lionel Jospin. Je me suis dit : ” C’est incroyable. Je ne pensais pas voir cela de mon vivant. ” J’ai eu un bon coup au cour. Cinq jours seulement… Le tout est de savoir maintenant ce qui va suivre. J’aimerais que l’on fasse quelque chose pour tous ceux qui étaient jeunes alors et qui ont été massacrés dans leur être vivant. Et puis que l’on parle de toutes les horreurs. Je n’aime pas beaucoup les États-Unis : mais eux, au moins, ont su parler de la guerre du Vietnam ; McNamara (1) dit aujourd’hui que c’était ” une bêtise “. Puisque nous sommes, semble-t-il, dans l’année de la repentance, que l’État français fasse sa repentance vis-à-vis de l’Algérie ! Et l’Algérie vis-à-vis de la France, car il y a eu, en effet, des horreurs des deux côtés. Mais la France, terre de ” civilisation chrétienne “, vous vous rendez compte !.
Entretien réalisé par.
Jean-Paul Monferran.
(1) Secrétaire à la Défense dans le gouvernement de John Kennedy.
dimanche 22 mai 2016
FIASCO LIBERAL
SOURCE
- See more at: http://www.entrefilets.com/Retour_sur_le_fiasco_liberal.html#sthash.qugddLac.dpuf
10/05/2016 Alors qu’il est pratiquement assuré que le bulldozer Trump affrontera la va-t-en-guerre Killary dans une présidentielle US au potentiel désormais explosif pour le Système, nous avons décidé de laisser un peu l’actualité de côté pour revenir sur le fiasco libéral qui a conduit notre contre-civilisation occidentale dans l’impasse mortifère où elle est encagée désormais. Car où que porte le regard, les signaux sont aux rouges. La guerre hégémonique pour les dernières ressources fait rage, la planète et les espèces suffoquent sous l’impératif de croissance éternelle et la démocratie n’est plus qu’un vernis dans la plupart des pays de notre vertueux monde-libre. Le modèle de société juridico-marchand du libéralisme, dans sa version ultime néolibéale, représente ainsi un fiasco complet, presque un «fait social total». Ne restent plus que les slogans furieux et la fuite en avant, le syndrome Titanic donc, pour une capitainerie hallucinée psalmodiant qu’il n’y pas d’alternative à la croissance et au progrès éternels, à la production et à l’accumulation de masse en attendant, enfin, le glorieux avènement d’une société mondiale unique, sans frontières ni race ni culture ni identité, où un magma de bobos-nomades flotteront dans la paix du Marché, tous défoncés à la même came consumériste. Sauf qu’en réalité le meilleur des mondes est déjà parti en sucette. Rien ne va plus. Alors comme toujours, on fonce tête baissée en croisant les doigts et en serrant les dents, histoire sans doute de forcer encore un peu le sourire avant le «grounding» final.
Avertissement
Nous ne nous étendrons pas dans ce billet sur la guerre à l’extérieur que notre vertueux monde-libre conduit de toute sa puissance pour accaparer les dernières ressources et/ou incorporer ou écraser les derniers récalcitrants à son indépassable modèle de société. Que l’on garde simplement à l’esprit qu’en toile de fond du fiasco libéral qui produit aujourd’hui la «Guerre de tous contre tous» dans son «sanctuaire», il existe le risque d’une guerre de haute intensité entre le Bloc atlantiste et ses rivaux asiatiques (1), éventuellement avec épilogue nucléaire d’ailleurs. Pour l’hyper-classe dominante atlantiste, la guerre totale fait toujours partie des options «sur la table» lorsque ses privilèges se trouvent menacés. Du fait de ses moyens illimités, l’hyper-classe a en effet la conviction profonde de pouvoir toujours survivre à tout, et que seule l’insurrection populaire (et son éventuelle guillotine) représente un réel danger pour elle. Et de deux maux...
Dans ce billet, nous voulons donc surtout nous attacher à mieux cerner les origines de cette contre-civilisation qui est la nôtre et qui perpètre dans un même élan presque joyeux l’abolition de l’homme (2) et le meurtre de la nature. Une contre-civilisation dont le libéralisme et son dévissage vers sa version néolibérale fournissent sans conteste l’essentiel du fondement idéologique.
Pour le titre de ce billet, nous avons un peu détourné celui d’un ouvrage de Jean-Claude Michéa: «La double pensée, retour sur la question libérale», bouquin que nous avons bien sûr pillé au passage pour enrichir notre propos.
Avertissement
Nous ne nous étendrons pas dans ce billet sur la guerre à l’extérieur que notre vertueux monde-libre conduit de toute sa puissance pour accaparer les dernières ressources et/ou incorporer ou écraser les derniers récalcitrants à son indépassable modèle de société. Que l’on garde simplement à l’esprit qu’en toile de fond du fiasco libéral qui produit aujourd’hui la «Guerre de tous contre tous» dans son «sanctuaire», il existe le risque d’une guerre de haute intensité entre le Bloc atlantiste et ses rivaux asiatiques (1), éventuellement avec épilogue nucléaire d’ailleurs. Pour l’hyper-classe dominante atlantiste, la guerre totale fait toujours partie des options «sur la table» lorsque ses privilèges se trouvent menacés. Du fait de ses moyens illimités, l’hyper-classe a en effet la conviction profonde de pouvoir toujours survivre à tout, et que seule l’insurrection populaire (et son éventuelle guillotine) représente un réel danger pour elle. Et de deux maux...
Dans ce billet, nous voulons donc surtout nous attacher à mieux cerner les origines de cette contre-civilisation qui est la nôtre et qui perpètre dans un même élan presque joyeux l’abolition de l’homme (2) et le meurtre de la nature. Une contre-civilisation dont le libéralisme et son dévissage vers sa version néolibérale fournissent sans conteste l’essentiel du fondement idéologique.
Pour le titre de ce billet, nous avons un peu détourné celui d’un ouvrage de Jean-Claude Michéa: «La double pensée, retour sur la question libérale», bouquin que nous avons bien sûr pillé au passage pour enrichir notre propos.
Un Droit procédural pour les contenir tous
Très schématiquement, il est communément admis que le libéralisme est né de l’effroi provoqué par les guerres civiles idéologiques qui ont dévasté les XVIème et XVIIème siècles.
L’idée était d’éviter la réédition de ces guerres par l’instauration d’un pouvoir absolument neutre, qui ne repose sur aucune religion, morale ou philosophie, afin d’assurer froidement à chacun protection et liberté individuelle. Le libéralisme politique est donc avant tout une idéologie du désespoir en ce sens qu’elle fait le constat que l’homme n’est pas l’animal politique d’Aristote, mais seulement «un loup pour l’homme», incapable du «vivre ensemble», et qu’il faut donc se contenter d’en gérer les féroces appétits dans une approche purement mécanique.
Pour gérer ces libertés individuelles soudain en concurrence darwinienne les unes avec les autres, le libéralisme s’est alors reposé tout entier sur un Droit purement procédural. Un droit sans référence ni religieuse ni morale ni philosophique donc, sorte de code de la route uniquement destinés à éviter les collisions entre les libertés à géométrie variable des usagers.
La fabrication d’un «peuple de démons»
Sauf qu’un système ou le pouvoir se veut détaché de toute religion, morale ou philosophie impose de fait un «relativisme moral et culturel» total qui incite les individus à grignoter des espaces de libertés de plus en plus larges, avec des prétentions de plus en plus subtiles ou extravagantes, voire déviantes.
Ne reposant que sur un vide de substance sidéral, le Droit libéral ne peut en effet que naviguer à vue et légiférer «à la carte».
Il le fait soit en fonction du degré d’agitation sociale ou des exigences supposées de l’opinion publique (toutes deux se résumant souvent à la surface médiatique que réussissent à occuper des lobbies au service d’intérêts particuliers), soit en fonction des desseins du pouvoir à un moment donné, les deux options étant souvent amenées à se confondre et à se conjuguer.
D’où l’érosion permanente de la «civilité commune» et la multiplication exponentielle des micros-conflits qui agitent nos sociétés désormais habitées par des «peuples de démons» encagés dans une Guerre de tous contre tous appelée à s’étendre indéfiniment.
En imposant par la violence légale des revendications idéologiques souvent minoritaires mais bruyantes à une majorité par nature silencieuse, le Droit libéral s’évertue aussi non seulement à diviser le tissu social à l’infini, mais à y injecter des frustrations et des rancœurs condamnées à la fermentation.
Accessoirement, un Droit libéral dès lors sans cesse contraint de s’adapter et de se contredire en fonction des rapports de force qui agitent la société finit nécessairement par se relativiser lui-même.
Car puisque ce qui était interdit hier (avortement, pornographie dure, drogue douce, mariage gay, «street art», eugénisme, sans papiers...) est autorisé ou au moins toléré aujourd’hui, les usagers sont fondés à penser que ce qui est interdit aujourd’hui a de bonnes chances d’être autorisé demain.
Dans le domaine sociétal, ne pas respecter le droit aujourd’hui, n’est-ce pas simplement être en avance sur son temps ?
L’idée était d’éviter la réédition de ces guerres par l’instauration d’un pouvoir absolument neutre, qui ne repose sur aucune religion, morale ou philosophie, afin d’assurer froidement à chacun protection et liberté individuelle. Le libéralisme politique est donc avant tout une idéologie du désespoir en ce sens qu’elle fait le constat que l’homme n’est pas l’animal politique d’Aristote, mais seulement «un loup pour l’homme», incapable du «vivre ensemble», et qu’il faut donc se contenter d’en gérer les féroces appétits dans une approche purement mécanique.
Pour gérer ces libertés individuelles soudain en concurrence darwinienne les unes avec les autres, le libéralisme s’est alors reposé tout entier sur un Droit purement procédural. Un droit sans référence ni religieuse ni morale ni philosophique donc, sorte de code de la route uniquement destinés à éviter les collisions entre les libertés à géométrie variable des usagers.
La fabrication d’un «peuple de démons»
Sauf qu’un système ou le pouvoir se veut détaché de toute religion, morale ou philosophie impose de fait un «relativisme moral et culturel» total qui incite les individus à grignoter des espaces de libertés de plus en plus larges, avec des prétentions de plus en plus subtiles ou extravagantes, voire déviantes.
Ne reposant que sur un vide de substance sidéral, le Droit libéral ne peut en effet que naviguer à vue et légiférer «à la carte».
Il le fait soit en fonction du degré d’agitation sociale ou des exigences supposées de l’opinion publique (toutes deux se résumant souvent à la surface médiatique que réussissent à occuper des lobbies au service d’intérêts particuliers), soit en fonction des desseins du pouvoir à un moment donné, les deux options étant souvent amenées à se confondre et à se conjuguer.
D’où l’érosion permanente de la «civilité commune» et la multiplication exponentielle des micros-conflits qui agitent nos sociétés désormais habitées par des «peuples de démons» encagés dans une Guerre de tous contre tous appelée à s’étendre indéfiniment.
En imposant par la violence légale des revendications idéologiques souvent minoritaires mais bruyantes à une majorité par nature silencieuse, le Droit libéral s’évertue aussi non seulement à diviser le tissu social à l’infini, mais à y injecter des frustrations et des rancœurs condamnées à la fermentation.
Accessoirement, un Droit libéral dès lors sans cesse contraint de s’adapter et de se contredire en fonction des rapports de force qui agitent la société finit nécessairement par se relativiser lui-même.
Car puisque ce qui était interdit hier (avortement, pornographie dure, drogue douce, mariage gay, «street art», eugénisme, sans papiers...) est autorisé ou au moins toléré aujourd’hui, les usagers sont fondés à penser que ce qui est interdit aujourd’hui a de bonnes chances d’être autorisé demain.
Dans le domaine sociétal, ne pas respecter le droit aujourd’hui, n’est-ce pas simplement être en avance sur son temps ?
Un Marché pour les gaver tous
Une telle société qui rejette par essence toute référence morale, religieuse ou philosophique ne peut évidemment rien incarner qui puisse «rassembler». Or il est d’autant plus important d’avoir une référence commune que cette société est littéralement atomisée par l’action du Droit «de tous sur tout».
Pour combler ce vide abyssal, le seul dénominateur commun admissible pour les libéraux ne pouvait donc être que l’intérêt particulier, pendant quantitatif de la liberté individuelle.
Les élites et le clergé médiatique de la société libérale ont donc immédiatement voué un culte véritablement religieux à l’Economie et à ses deux mamelles nourricières: la science et le progrès.
Très rapidement, le Marché est donc devenu ce Deus ex machina, ce nouveau Dieu laïc, supposé neutre, dont la fameuse main invisible allait pouvoir «les» gaver tous, les rassembler tous dans la grande orgie consumériste, et donc susciter l’adoration.
Face à l’atomisation de la société, le Marché représente en effet «la seule base de repli philosophique dont dispose le libéralisme politique et culturel».
Briser les résistances naturelles
Mais imposer puis maintenir sur le trône un nouveau Dieu n’est pas une sinécure. Il faut d’abord s’assurer qu’il soit reconnu comme tel par les individus qui doivent pour commencer accepter son message, d’où la nécessité d’abord de les convertir à la nouvelle religion en les réduisant en l’espèce à de dociles consommateurs.
C’est là que surgit un premier écueil pour le libéralisme devenu Système néolibéral: car il est clair qu’il existe chez l’homme et dans les peuples une inclination naturelle pour un ensemble de «valeurs» partagées qui contredisent le principe fondateur du libéralisme, à savoir que l’homme n’est qu’un loup pour l’homme. Comme par exemple «un minimum de dispositions psychologiques et culturelles à la confiance, la générosité, le sens du bien commun. Autant de «gisements culturels» que le monde juridico-marchand du libéralisme se doit d’assécher», puisqu’ils invalident son principe fondateur.
Dans un rapport officiel produit sous Sarkozy on pouvait ainsi lire que «l’un des principaux freins à la croissance capitaliste est la répugnance morale persistante des gens ordinaires envers l’économie de marché et son moteur, le profit» (3).
Dans le même genre de perles froidement produites par les «experts» assermentés du Système, un rapport émanant cette fois de l’Ambassade américaine en Birmanie soulignait quant à lui que «les difficultés rencontrées par les entreprises américaines pour s’implanter en profondeur dans ce pays tenait au fait que la recherche du profit individuel et le désir de s’enrichir occupaient encore une place trop marginale dans la société traditionnelle birmane» (4).
L’avènement d’un monde n’ayant rien d’autre à offrir que la Guerre de tous contre tous et l’addiction à la came consumériste nécessite donc, on le voit, un gros travail de formatage en profondeur des individus et des sociétés.
La deuxième contrainte qui s’impose au libéralisme pour maintenir son dieu-Marché sur le trône est de s’assurer qu’il puisse être éternellement en mesure «de les gaver tous», de combler tous «leurs» désirs, d’où l’impératif de croissance éternelle et le culte de la science et du progrès.
Sans nous appesantir sur la stupidité intrinsèque du concept de croissance éternelle du fait de son impossibilité pratique (et même théorique d’ailleurs), relevons avec Jean-Claude Michéa le fait que cet impératif de croissance «ne peux trouver ses bases que dans une culture de la consommation généralisée, c’est-à-dire dans cet imaginaire permissif, fashion et rebelle dont l’apologie permanente est devenue la raison d’être de la nouvelle gauche». «Une économie libérale [de droite donc] ne peut dès lors fonctionner, dit-il, que «grâce à une culture de gauche».
Pour combler ce vide abyssal, le seul dénominateur commun admissible pour les libéraux ne pouvait donc être que l’intérêt particulier, pendant quantitatif de la liberté individuelle.
Les élites et le clergé médiatique de la société libérale ont donc immédiatement voué un culte véritablement religieux à l’Economie et à ses deux mamelles nourricières: la science et le progrès.
Très rapidement, le Marché est donc devenu ce Deus ex machina, ce nouveau Dieu laïc, supposé neutre, dont la fameuse main invisible allait pouvoir «les» gaver tous, les rassembler tous dans la grande orgie consumériste, et donc susciter l’adoration.
Face à l’atomisation de la société, le Marché représente en effet «la seule base de repli philosophique dont dispose le libéralisme politique et culturel».
Briser les résistances naturelles
Mais imposer puis maintenir sur le trône un nouveau Dieu n’est pas une sinécure. Il faut d’abord s’assurer qu’il soit reconnu comme tel par les individus qui doivent pour commencer accepter son message, d’où la nécessité d’abord de les convertir à la nouvelle religion en les réduisant en l’espèce à de dociles consommateurs.
C’est là que surgit un premier écueil pour le libéralisme devenu Système néolibéral: car il est clair qu’il existe chez l’homme et dans les peuples une inclination naturelle pour un ensemble de «valeurs» partagées qui contredisent le principe fondateur du libéralisme, à savoir que l’homme n’est qu’un loup pour l’homme. Comme par exemple «un minimum de dispositions psychologiques et culturelles à la confiance, la générosité, le sens du bien commun. Autant de «gisements culturels» que le monde juridico-marchand du libéralisme se doit d’assécher», puisqu’ils invalident son principe fondateur.
Dans un rapport officiel produit sous Sarkozy on pouvait ainsi lire que «l’un des principaux freins à la croissance capitaliste est la répugnance morale persistante des gens ordinaires envers l’économie de marché et son moteur, le profit» (3).
Dans le même genre de perles froidement produites par les «experts» assermentés du Système, un rapport émanant cette fois de l’Ambassade américaine en Birmanie soulignait quant à lui que «les difficultés rencontrées par les entreprises américaines pour s’implanter en profondeur dans ce pays tenait au fait que la recherche du profit individuel et le désir de s’enrichir occupaient encore une place trop marginale dans la société traditionnelle birmane» (4).
L’avènement d’un monde n’ayant rien d’autre à offrir que la Guerre de tous contre tous et l’addiction à la came consumériste nécessite donc, on le voit, un gros travail de formatage en profondeur des individus et des sociétés.
La deuxième contrainte qui s’impose au libéralisme pour maintenir son dieu-Marché sur le trône est de s’assurer qu’il puisse être éternellement en mesure «de les gaver tous», de combler tous «leurs» désirs, d’où l’impératif de croissance éternelle et le culte de la science et du progrès.
Sans nous appesantir sur la stupidité intrinsèque du concept de croissance éternelle du fait de son impossibilité pratique (et même théorique d’ailleurs), relevons avec Jean-Claude Michéa le fait que cet impératif de croissance «ne peux trouver ses bases que dans une culture de la consommation généralisée, c’est-à-dire dans cet imaginaire permissif, fashion et rebelle dont l’apologie permanente est devenue la raison d’être de la nouvelle gauche». «Une économie libérale [de droite donc] ne peut dès lors fonctionner, dit-il, que «grâce à une culture de gauche».
Une propagande pour les enfumer tous
D’où la nécessité de cette immense œuvre d’ingénierie sociale, de déstructuration des sociétés et d’abolition de l’homme en cours aujourd’hui. C’est-à-dire cette fameuse «révolution culturelle permanente» dont le but est «d’éradiquer tous les obstacles historiques et philosophiques à l’accumulation du Capital» (Marx parlait aussi de l’obligation pour une société libérale «de révolutionner constamment l’ensemble des rapports sociaux. (...) Le but final n’est rien, le mouvement est tout.»).
Aujourd’hui, le grand chantier de cette déconstruction sociale est la chasse gardée de cette nouvelle gauche libérale dont le goût pour la transgression est devenu quasi obsessionnel depuis Mai 68. L’objectif est de faire éclater tous les cadres de référence, toutes les frontières physiques (5) ou morales, de faire reculer tous les tabous, d’invertir tous les dégoûts, pour libérer tous les instincts et paver la voie au droit de tous sur tout, pour encourager chez tous le désir de tous les désirs, que le Dieu-Marché sera là pour assouvir.
L’immense Machine à enfumer du Système (qui regroupe l’industrie de «l’information» désormais domestiquée, mais aussi celles du divertissement et de la pub) entre alors en action pour relayer le message dans les «cerveaux disponibles» avec des moyens d’ailleurs quasi-illimités (cette Machine à enfumer représente le deuxième poste mondial de dépenses après... l’armement).
Un français de plus de 4 ans passe ainsi, par exemple, en moyenne 3,36 heures devant sa télévision chaque jour. C'est-à-dire qu’en un an, il reste assis à fixer une petite boîte diffusant les messages du Système durant…. 54 jours par an sans discontinuer.
Ce formatage cible bien sûr avec une attention et une violence toute particulière les enfants et les plus jeunes dont il s’agit de cultiver dès le berceau le désir, le droit et même l’obligation de consommer. La multiplication des chaînes de télévision abrutissantes à destination des enfants (et même des bébés désormais (6)) est là pour l’attester.
Car ça marche. La puissance de l’image sur le cerveau n’est plus à démontrer et le formatage des enfants de la télé est une réalité mesurable. On sait par exemple que dans les pays occidentaux comme le relève Jean-Claude Michéa, «plus du 70% des achats opérés par les ménages se font sous la pression morale et psychologique de leurs propres enfants».
Mai 68 au service du Capital
A ce stade, un court détour par Mai 68 s’impose pour le cas français. Car on ne dira jamais assez que c’est à cette occasion qu’en braquant les projecteurs médiatiques sur la mouvance de Cohn-Bendit et de son joyeux combat pour la libération des mœurs et contre les discriminations, le libéralisme a réussi le tour de force de liquider en quelques années la révolte anticapitaliste des origines.
«Vivre sans temps mort et jouir sans entrave» ou «Il est interdit d’interdire» ont été et restent les slogans les plus conformes à la logique libérale du monde marchand globalisé.
En ce sens, et c’est Cohn-Bendit qui le dit lui-même dans une conversation avec Philippe De Villiers, Mai 68 aura avant tout été «une révolution bourgeoise»... et libérale. Ses hérauts ont d’ailleurs été grassement remerciés par le système qui leur a offert pratiquement à tous de lucratives carrières dans ses moelleuses entrailles.
A partir de ce moment-là, le prolétaire est rapidement devenu une figure risible, et le combat contre le capitalisme d’un ringard absolu.
N’a progressivement plus compté que la libération des mœurs, de la femme, de l’immigré, puis du sans-papiers, puis des gays, des bi, des lesbiennes et enfin des «trans», et bien sûr du consommateur.
En France, la création merveilleusement cynique de SOS racisme par le machiavélique Mitterrand aura ensuite achevé de boucler la boucle en faisant des «antifas» les crétins les plus utiles du système, les gardiens zélés de l’alternance éternelle entre les deux mamelles libérales du Parti unique.
Dès lors que le combat social était réduit à une accumulation de micros-conflits sociétaux, le libéralisme pouvait savourer un triomphe absolu de près d’un demi-siècle, essentiellement au profit d’une hyper-classe de prédateurs apatrides accaparant la presque totalité des richesses mondiales.
Aujourd’hui, le grand chantier de cette déconstruction sociale est la chasse gardée de cette nouvelle gauche libérale dont le goût pour la transgression est devenu quasi obsessionnel depuis Mai 68. L’objectif est de faire éclater tous les cadres de référence, toutes les frontières physiques (5) ou morales, de faire reculer tous les tabous, d’invertir tous les dégoûts, pour libérer tous les instincts et paver la voie au droit de tous sur tout, pour encourager chez tous le désir de tous les désirs, que le Dieu-Marché sera là pour assouvir.
L’immense Machine à enfumer du Système (qui regroupe l’industrie de «l’information» désormais domestiquée, mais aussi celles du divertissement et de la pub) entre alors en action pour relayer le message dans les «cerveaux disponibles» avec des moyens d’ailleurs quasi-illimités (cette Machine à enfumer représente le deuxième poste mondial de dépenses après... l’armement).
Un français de plus de 4 ans passe ainsi, par exemple, en moyenne 3,36 heures devant sa télévision chaque jour. C'est-à-dire qu’en un an, il reste assis à fixer une petite boîte diffusant les messages du Système durant…. 54 jours par an sans discontinuer.
Ce formatage cible bien sûr avec une attention et une violence toute particulière les enfants et les plus jeunes dont il s’agit de cultiver dès le berceau le désir, le droit et même l’obligation de consommer. La multiplication des chaînes de télévision abrutissantes à destination des enfants (et même des bébés désormais (6)) est là pour l’attester.
Car ça marche. La puissance de l’image sur le cerveau n’est plus à démontrer et le formatage des enfants de la télé est une réalité mesurable. On sait par exemple que dans les pays occidentaux comme le relève Jean-Claude Michéa, «plus du 70% des achats opérés par les ménages se font sous la pression morale et psychologique de leurs propres enfants».
Mai 68 au service du Capital
A ce stade, un court détour par Mai 68 s’impose pour le cas français. Car on ne dira jamais assez que c’est à cette occasion qu’en braquant les projecteurs médiatiques sur la mouvance de Cohn-Bendit et de son joyeux combat pour la libération des mœurs et contre les discriminations, le libéralisme a réussi le tour de force de liquider en quelques années la révolte anticapitaliste des origines.
«Vivre sans temps mort et jouir sans entrave» ou «Il est interdit d’interdire» ont été et restent les slogans les plus conformes à la logique libérale du monde marchand globalisé.
En ce sens, et c’est Cohn-Bendit qui le dit lui-même dans une conversation avec Philippe De Villiers, Mai 68 aura avant tout été «une révolution bourgeoise»... et libérale. Ses hérauts ont d’ailleurs été grassement remerciés par le système qui leur a offert pratiquement à tous de lucratives carrières dans ses moelleuses entrailles.
A partir de ce moment-là, le prolétaire est rapidement devenu une figure risible, et le combat contre le capitalisme d’un ringard absolu.
N’a progressivement plus compté que la libération des mœurs, de la femme, de l’immigré, puis du sans-papiers, puis des gays, des bi, des lesbiennes et enfin des «trans», et bien sûr du consommateur.
En France, la création merveilleusement cynique de SOS racisme par le machiavélique Mitterrand aura ensuite achevé de boucler la boucle en faisant des «antifas» les crétins les plus utiles du système, les gardiens zélés de l’alternance éternelle entre les deux mamelles libérales du Parti unique.
Dès lors que le combat social était réduit à une accumulation de micros-conflits sociétaux, le libéralisme pouvait savourer un triomphe absolu de près d’un demi-siècle, essentiellement au profit d’une hyper-classe de prédateurs apatrides accaparant la presque totalité des richesses mondiales.
La décadence, pour les égarer tous
Pour soutenir cette révolution culturelle permanente, il faut toutefois sans cesse offrir du nouveau, de nouvelles libertés qui puissent engendrer de nouveaux désirs, et entretenir ainsi l’illusion d’un monde qui avance, qui «progresse».
Sous la poussée des modes et des tendances les plus extrêmes soigneusement cultivées par l’intelligentsia libérale (de la rive gauche donc), le droit procédural est ainsi pris en otage, ne pouvant refuser à l’un l’équivalent de ce qu’il a accordé à l’autre.
Ainsi, il est clair par exemple que le fameux «Mariage pour tous» (dont les opposants ont immédiatement été réduits à une horde d’homophobes décérébrés) débouchera inévitablement sur la banalisation de la non moins fameuse «Gestation par autrui», c’est-à-dire à terme sur celle de la location généralisée du ventre des femmes les plus pauvres. Sur la base de quelle référence morale en effet le droit libéral va-t-il longtemps pouvoir interdire aux couples homosexuels d’avoir leurs propres enfants? Au nom de quoi, de quelle morale, interdirait-il ensuite ce même droit aux célibataires, voire aux couples aisés dont Madame souhaiterait éviter les vergetures?
Sous couvert de «progrès social», le dieu-Marché est ainsi en passe d’étendre son emprise jusqu’à la matrice des femmes désormais.
Déjà, le tabou des tabous, l’inceste, a été levé en Angleterre où une maman vient d’accoucher de l’enfant de son fils homosexuel. Enfant qui est donc son fils et son petit-fils en même temps, et qui est tout à la fois le fils et le frère de son géniteur (7). Tout cela sous les acclamations exaltées de notre progressisme néolibéral.
On ne peut que le constater, il n’y a techniquement aucune limite à ces dérives. Et à cet égard, l’activisme des lobbies nous promet encore à n’en pas douter de merveilleux et fédérateurs progrès sociaux (8).
Une certaine tolérance pourrait même voir le jour s’agissant de la pédophilie. Il suffirait en effet qu’une association de jeunes filles ou garçon de 12 ans, soutenue par un puissant lobby présidé, au hasard, par un ex-ministre de la culture française, revendique le droit à des rapports du fait d’une maturité sexuelle d’une précocité admirable (par la grâce conjuguée de l’éducation télévisuelle et des perturbateurs endocriniens de notre chère industrie agro-alimentaire), et l’on est presque tenté de dire que le tour serait joué.
On nous rétorquera que c’est pousser le bouchon un peu loin. Soit. Mais souvenons-nous que dans les années 1970, des journaux comme Le Monde et Libération faisaient l’apologie de la pédophilie (9).
Question de tendance donc, d’époque et de courants de pensée auxquels le Droit libéral, amoral par nature, n’a d’autres choix que de se plier.
Pour mesurer en quelle haute estime ce Système tient le Sacré, on signalera enfin le récent cas de l’Eglise du «spaghetti volant» qui a été très officiellement autorisée à célébrer des mariages désormais légaux en Nouvelle-Zélande (10).
Sous la poussée des modes et des tendances les plus extrêmes soigneusement cultivées par l’intelligentsia libérale (de la rive gauche donc), le droit procédural est ainsi pris en otage, ne pouvant refuser à l’un l’équivalent de ce qu’il a accordé à l’autre.
Ainsi, il est clair par exemple que le fameux «Mariage pour tous» (dont les opposants ont immédiatement été réduits à une horde d’homophobes décérébrés) débouchera inévitablement sur la banalisation de la non moins fameuse «Gestation par autrui», c’est-à-dire à terme sur celle de la location généralisée du ventre des femmes les plus pauvres. Sur la base de quelle référence morale en effet le droit libéral va-t-il longtemps pouvoir interdire aux couples homosexuels d’avoir leurs propres enfants? Au nom de quoi, de quelle morale, interdirait-il ensuite ce même droit aux célibataires, voire aux couples aisés dont Madame souhaiterait éviter les vergetures?
Sous couvert de «progrès social», le dieu-Marché est ainsi en passe d’étendre son emprise jusqu’à la matrice des femmes désormais.
Déjà, le tabou des tabous, l’inceste, a été levé en Angleterre où une maman vient d’accoucher de l’enfant de son fils homosexuel. Enfant qui est donc son fils et son petit-fils en même temps, et qui est tout à la fois le fils et le frère de son géniteur (7). Tout cela sous les acclamations exaltées de notre progressisme néolibéral.
On ne peut que le constater, il n’y a techniquement aucune limite à ces dérives. Et à cet égard, l’activisme des lobbies nous promet encore à n’en pas douter de merveilleux et fédérateurs progrès sociaux (8).
Une certaine tolérance pourrait même voir le jour s’agissant de la pédophilie. Il suffirait en effet qu’une association de jeunes filles ou garçon de 12 ans, soutenue par un puissant lobby présidé, au hasard, par un ex-ministre de la culture française, revendique le droit à des rapports du fait d’une maturité sexuelle d’une précocité admirable (par la grâce conjuguée de l’éducation télévisuelle et des perturbateurs endocriniens de notre chère industrie agro-alimentaire), et l’on est presque tenté de dire que le tour serait joué.
On nous rétorquera que c’est pousser le bouchon un peu loin. Soit. Mais souvenons-nous que dans les années 1970, des journaux comme Le Monde et Libération faisaient l’apologie de la pédophilie (9).
Question de tendance donc, d’époque et de courants de pensée auxquels le Droit libéral, amoral par nature, n’a d’autres choix que de se plier.
Pour mesurer en quelle haute estime ce Système tient le Sacré, on signalera enfin le récent cas de l’Eglise du «spaghetti volant» qui a été très officiellement autorisée à célébrer des mariages désormais légaux en Nouvelle-Zélande (10).
De moins en moins de came pour tous
Dans cet environnement taillé sur mesure, le dieu-Marché a donc pu grandir, se développer et même se déchaîner jusqu’à s’émanciper, dictant désormais sa loi à tous, y compris à ses créateurs.
Sous son règne, la science enfin libérée de tous principes éthique ou de précaution s’est mise au service de l’industrie pour triturer jusqu’aux replis les plus intimes de la vie afin de la commercialiser, imposant la multiplication des pollutions sous couvert de progrès, des ondes WIFI aux OGM en passant par les nanotechnologies (11).
Sous ses commandements, le meurtre du vivant s’est organisé à l’échelle industrielle. La terre étouffe aujourd’hui sous les déchets, les cancers environnementaux explosent, la fécondité humaine s’étiole dangereusement, les espèces disparaissent et les animaux «utiles» crèvent dans un univers carcéral industriel d’épouvante. Quant aux océans, ils agonisent sous le poids d’une libre-circulation des marchandises qui entraîne le déversement quotidien de 5000 tonnes de produits chimiques dans ses eaux par les navires marchands.
Mais ces dommages collatéraux ne sont bien évidemment rien pour le dieu-Marché, car la production et l’accumulation de masse sont tout.
Le seul vrai problème qui se pose à lui aujourd’hui vient du fait que la croissance éternelle censée fournir la came nécessaire à son adoration commence à faire défaut.
Or la diminution de la came à partager pose un problème réellement existentiel aux sociétés libérales. Car si le mythe de la croissance éternelle s’évanoui, c’est le dieu-Marché qui s’effondre, et donc le chaos qui surgit puisqu’il ne restera dès lors qu’une guerre de tous contre tous sans plus rien au Système pour rassembler derrière lui.
Le chaos assuré donc, avec des peuples rendus irascibles par la cure de sevrage imposée, et dont l’Hyper-classe libérale apatride aurait en effet tout à craindre.
Alors bien sûr, le clergé politico-médiatique libéral nous assure que le progrès éternel nous conduira tôt ou tard à la troisième, quatrième, millième révolution industrielle qui nous sauvera tous et relancera la machine.
Il faut avoir la foi. La croissance éternelle va renaître de ses cendres et tout va continuer.
La came va revenir, meilleure qu’avant, c’est promis.
Des vertus de la «précarité choisie»
Dans l’intervalle, les apôtres du dieu-Marché nous demandent toutefois quelques ajustements, temporaires bien sûr, qu’ils nomment pudiquement l’austérité.
Fin avril dernier, lors d’un débat télévisuel tenu sur une chaîne française à propos de la Loi sur le Travail, un politicien libéral expliquait même sans sourciller le moins du monde combien la «précarité voulue» à venir serait merveilleuse, par opposition à la «précarité subie». Car cette précarité voulue allait enfin rendre les Français libres, libres de «s’épanouir dans deux ou trois emplois» [mal payés] au lieu de s’ennuyer avec un seul job [bien payé]. Il fallait oser.
Autre méthode de sevrage : la vertueuse importation de millions d’immigrés permettant d’abord de fournir des travailleurs bon-marché aux industries, puis de faire baisser les salaires de tous (sevrage donc), et enfin de payer les retraites d’une Europe quasiment stérilisée par des décennies d’abus de came consumériste.
Sans compter que ce «grand remplacement» des populations (12) a l’avantage d’être le plus court chemin vers cette Société mondiale de bobos-consommateurs «hypes» et «smarts» dont rêve le Marché, et qui passe évidemment par la destruction de toutes les frontières, races, cultures et identités honnies.
L’avenir à la sauce libérale semble donc tout tracé en attendant le prochain arrivage de came: aimer sa servitude dans la pauvreté et la monoculture «world» globalisées, tout en cherchant éventuellement un sens à sa vie en fréquentant l’«Eglise du spaghetti volant», et en allant se cultiver devant un «plug anal» géant Place Vendôme, ou le «vagin de la reine» à Versailles (13).
Nous sommes libres, totalement libres.
Sous son règne, la science enfin libérée de tous principes éthique ou de précaution s’est mise au service de l’industrie pour triturer jusqu’aux replis les plus intimes de la vie afin de la commercialiser, imposant la multiplication des pollutions sous couvert de progrès, des ondes WIFI aux OGM en passant par les nanotechnologies (11).
Sous ses commandements, le meurtre du vivant s’est organisé à l’échelle industrielle. La terre étouffe aujourd’hui sous les déchets, les cancers environnementaux explosent, la fécondité humaine s’étiole dangereusement, les espèces disparaissent et les animaux «utiles» crèvent dans un univers carcéral industriel d’épouvante. Quant aux océans, ils agonisent sous le poids d’une libre-circulation des marchandises qui entraîne le déversement quotidien de 5000 tonnes de produits chimiques dans ses eaux par les navires marchands.
Mais ces dommages collatéraux ne sont bien évidemment rien pour le dieu-Marché, car la production et l’accumulation de masse sont tout.
Le seul vrai problème qui se pose à lui aujourd’hui vient du fait que la croissance éternelle censée fournir la came nécessaire à son adoration commence à faire défaut.
Or la diminution de la came à partager pose un problème réellement existentiel aux sociétés libérales. Car si le mythe de la croissance éternelle s’évanoui, c’est le dieu-Marché qui s’effondre, et donc le chaos qui surgit puisqu’il ne restera dès lors qu’une guerre de tous contre tous sans plus rien au Système pour rassembler derrière lui.
Le chaos assuré donc, avec des peuples rendus irascibles par la cure de sevrage imposée, et dont l’Hyper-classe libérale apatride aurait en effet tout à craindre.
Alors bien sûr, le clergé politico-médiatique libéral nous assure que le progrès éternel nous conduira tôt ou tard à la troisième, quatrième, millième révolution industrielle qui nous sauvera tous et relancera la machine.
Il faut avoir la foi. La croissance éternelle va renaître de ses cendres et tout va continuer.
La came va revenir, meilleure qu’avant, c’est promis.
Des vertus de la «précarité choisie»
Dans l’intervalle, les apôtres du dieu-Marché nous demandent toutefois quelques ajustements, temporaires bien sûr, qu’ils nomment pudiquement l’austérité.
Fin avril dernier, lors d’un débat télévisuel tenu sur une chaîne française à propos de la Loi sur le Travail, un politicien libéral expliquait même sans sourciller le moins du monde combien la «précarité voulue» à venir serait merveilleuse, par opposition à la «précarité subie». Car cette précarité voulue allait enfin rendre les Français libres, libres de «s’épanouir dans deux ou trois emplois» [mal payés] au lieu de s’ennuyer avec un seul job [bien payé]. Il fallait oser.
Autre méthode de sevrage : la vertueuse importation de millions d’immigrés permettant d’abord de fournir des travailleurs bon-marché aux industries, puis de faire baisser les salaires de tous (sevrage donc), et enfin de payer les retraites d’une Europe quasiment stérilisée par des décennies d’abus de came consumériste.
Sans compter que ce «grand remplacement» des populations (12) a l’avantage d’être le plus court chemin vers cette Société mondiale de bobos-consommateurs «hypes» et «smarts» dont rêve le Marché, et qui passe évidemment par la destruction de toutes les frontières, races, cultures et identités honnies.
L’avenir à la sauce libérale semble donc tout tracé en attendant le prochain arrivage de came: aimer sa servitude dans la pauvreté et la monoculture «world» globalisées, tout en cherchant éventuellement un sens à sa vie en fréquentant l’«Eglise du spaghetti volant», et en allant se cultiver devant un «plug anal» géant Place Vendôme, ou le «vagin de la reine» à Versailles (13).
Nous sommes libres, totalement libres.
Le totalitarisme ou la guerre pour tous ?
Dans les démocraties libérales, soulignait Guy Debord, «les droits dont nous disposons sont essentiellement des droits de spectateurs». C’est-à-dire, précise Jean-Claude Michéa, des droits «qui nous laissent libres de critiquer le film qu’a décidé de nous projeter le Système, mais en aucun cas d’en modifier le scénario».
L’exemple du Traité constitutionnel européen, rejeté par référendum en 2005 par la France et les Pays-Bas, puis ratifié par voie parlementaire par ces deux pays sous l’appellation de Traité de Lisbonne, suffit à démontrer qu’en effet le Système ne tolère pas que le peuple s’immisce dans ses choix fondamentaux.
Il n’en reste pas moins qu’en période de vaches grasses vous avez, contrairement aux dictatures pures et dures, la liberté de ne pas aimer le goût de l’eau dans laquelle on vous noie et de le dire.
Oui mais voilà. En période de vaches maigres, la donne change.
Et que se passera-t-il si la came consumériste vient à manquer massivement et durablement, ce qui est aujourd’hui le scénario le plus probable.
S’il est évident qu’un certain degré de libertés individuelles est nécessaire à toutes sociétés libérales, la possibilité d’une dérive vers le totalitarisme, voire la dictature, doit être envisagée en cas de pénurie.
Surtout que la très opportune guerre contre le terrorisme de ces 15 dernières années a permis à toutes les armées de notre merveilleux monde libre de se doter de moyens très performants en matière de surveillance globale et de contre-insurrection (le modèle indépassable en la matière restant Israël, qui a prouvé qu’avec les technologies modernes de répression, un petit groupe pouvait très bien prospérer dans un océan d’hostilité et de pauvreté en jouant sur les seuls curseurs des atrocités et des privations (14)).
Comme le rappelle Jean-Claude Michéa, le pape du libéralisme moderne Hayek himself, en se fondant sur l’expérience du Chili, «avait fini par défendre la légitimité philosophique d’une dictature provisoire libérale destinée dans certaines circonstances bien précises à remettre sur les rails une économie capitaliste menacée par des insurrections populaires».
En cas de pénurie durable de came, les sociétés libérales n’hésiteront donc pas une seconde à basculer dans le totalitarisme et la répression pour pouvoir «perdurer dans leur être».
Premières crispations totalitaires
L’actualité récente montre d’ailleurs qu’il nous faut déjà relativiser la réalité de cette liberté de spectateur dont parlait Debord.
Car au fur et à mesure que la panique grandit face à la pénurie de came, le Système néolibéral se crispe et exige non seulement que vous adhériez à ses choix et à ses dérives, mais que vous souteniez sa narrative. Il devient alors de plus en plus difficile d’exercer ce droit de spectateur et de critiquer le film. Car désormais, vous devez «penser» comme le Système et on observe une élévation spectaculaire du niveau d’intolérance du clergé-Système depuis quelques années.
Interdiction de spectacles ou de livres se multiplient et les accusations de racisme, d’homophobie, de complotisme et autres extrémismes divers sont là pour interdire désormais tout débat de fond, pour frapper ceux qui rejettent le catéchisme officiel, ceux qui ne «pensent» pas comme il faut, comme ils doivent, et qu’il faut donc «repérer et traiter» (15).
Enfin, si la répression et la police de la pensée ne suffisent plus à «dociliser» les peuples en cure de sevrage, la guerre globale de haute intensité restera toujours l’une des options sur la table pour un dieu-Marché aux abois.
L’exemple du Traité constitutionnel européen, rejeté par référendum en 2005 par la France et les Pays-Bas, puis ratifié par voie parlementaire par ces deux pays sous l’appellation de Traité de Lisbonne, suffit à démontrer qu’en effet le Système ne tolère pas que le peuple s’immisce dans ses choix fondamentaux.
Il n’en reste pas moins qu’en période de vaches grasses vous avez, contrairement aux dictatures pures et dures, la liberté de ne pas aimer le goût de l’eau dans laquelle on vous noie et de le dire.
Oui mais voilà. En période de vaches maigres, la donne change.
Et que se passera-t-il si la came consumériste vient à manquer massivement et durablement, ce qui est aujourd’hui le scénario le plus probable.
S’il est évident qu’un certain degré de libertés individuelles est nécessaire à toutes sociétés libérales, la possibilité d’une dérive vers le totalitarisme, voire la dictature, doit être envisagée en cas de pénurie.
Surtout que la très opportune guerre contre le terrorisme de ces 15 dernières années a permis à toutes les armées de notre merveilleux monde libre de se doter de moyens très performants en matière de surveillance globale et de contre-insurrection (le modèle indépassable en la matière restant Israël, qui a prouvé qu’avec les technologies modernes de répression, un petit groupe pouvait très bien prospérer dans un océan d’hostilité et de pauvreté en jouant sur les seuls curseurs des atrocités et des privations (14)).
Comme le rappelle Jean-Claude Michéa, le pape du libéralisme moderne Hayek himself, en se fondant sur l’expérience du Chili, «avait fini par défendre la légitimité philosophique d’une dictature provisoire libérale destinée dans certaines circonstances bien précises à remettre sur les rails une économie capitaliste menacée par des insurrections populaires».
En cas de pénurie durable de came, les sociétés libérales n’hésiteront donc pas une seconde à basculer dans le totalitarisme et la répression pour pouvoir «perdurer dans leur être».
Premières crispations totalitaires
L’actualité récente montre d’ailleurs qu’il nous faut déjà relativiser la réalité de cette liberté de spectateur dont parlait Debord.
Car au fur et à mesure que la panique grandit face à la pénurie de came, le Système néolibéral se crispe et exige non seulement que vous adhériez à ses choix et à ses dérives, mais que vous souteniez sa narrative. Il devient alors de plus en plus difficile d’exercer ce droit de spectateur et de critiquer le film. Car désormais, vous devez «penser» comme le Système et on observe une élévation spectaculaire du niveau d’intolérance du clergé-Système depuis quelques années.
Interdiction de spectacles ou de livres se multiplient et les accusations de racisme, d’homophobie, de complotisme et autres extrémismes divers sont là pour interdire désormais tout débat de fond, pour frapper ceux qui rejettent le catéchisme officiel, ceux qui ne «pensent» pas comme il faut, comme ils doivent, et qu’il faut donc «repérer et traiter» (15).
Enfin, si la répression et la police de la pensée ne suffisent plus à «dociliser» les peuples en cure de sevrage, la guerre globale de haute intensité restera toujours l’une des options sur la table pour un dieu-Marché aux abois.
Du bon usage du déclin
Certes, il est indéniable que le capitalisme et sa version libérale ont permis l’émergence d’un certain nombre de libertés et de progrès remarquables avant de se fracasser au fond de leurs impasses.
L’abondance de matière et de richesse a, durant une période de quelques décennies, notamment durant les Trente Glorieuses, assuré l’élévation spectaculaire du niveau de vie d’un nombre toutefois réduit de personnes dans un nombre encore plus réduit de pays.
Mais il ne faut jamais oublier deux choses.
Premièrement: sous la poussée du nihilisme néolibéral, l’orgie consumériste occidentale s’est très bien accommodée du fait que la moitié de la planète crevait de faim en parallèle, et que des pays entiers étaient livrés à la guerre civile et aux massacres de masse pour permettre l’abondance de la came justement.
Deuxièmement: le modèle consumériste occidental a broyé la presque totalité de l’écosystème mondial et a accumulé une dette financière et écologique qui pèsera pour des siècles sur les épaules des générations à venir. Nous sommes ainsi les premières générations dont l’organisation sociale les aura poussés à voler leurs propres enfants, à considérer leur avenir et leur santé avec la plus invraisemblable désinvolture.
A ce prix-là, il ne manquerait plus que l’orgie ait été décevante.
La fête est finie
Sauf que la fête est finie.
Notre démocratie néolibérale est aujourd’hui encagée dans deux impasses.
La première est que du fait de ses dérives transgressives sans fin et de sa guerre de tous contre tous, le néolibéralisme politique et culturel rend la cohabitation de plus en plus impossible dans une société littéralement atomisée et livrée à la seule concurrence des intérêts particuliers de chacun.
La deuxième impasse est que le règne du dieu-Marché ne peut tout simplement pas survivre à un défaut de croissance éternelle.
Des cerveaux de moins en moins «disponibles»
Enfin, un problème nouveau se pose au Système néolibéral. Un problème qui concentre et autorise toutes les espérances. Car fort heureusement, le modèle nihiliste du néolibéralisme n’est pas parvenu à assécher totalement les «gisements culturels», à abolir l’homme, ce qui montre que l’humanité n’a pas encore jeté l’éponge.
Tous les mouvements dissidents, alternatifs ou antisystèmes qui se développent massivement aujourd’hui démontrent même que cette humanité arrive à saturation devant le vide glacé et l’absence totale de sens qu’impose aujourd’hui aux peuples les sociétés néolibérales. Dans la plupart des nations occidentales, les populations sont écœurées par la farce d’une démocratie d’opérette qui suinte l’indécence de tous ses pores.
L’effarante tentative d’ingénierie sociale globalisée pour abolir l’homme, le faire régresser, lui arracher sa dignité, sa spiritualité et pour finir son humanité afin de le reconfigurer selon les besoins du Marché est un cuisant échec.
Alors les néolibéraux peuvent bien rêver de transhumanisme et de singularité, de googeliser le monde et les hommes, les «cerveaux disponibles» pour le grand formatage le sont de moins en moins.
L’homme résiste, petitement, maladroitement, malgré le poids écrasant de la Machine, ou peut-être même à cause de ce poids.
L’humanité s’ébroue.
Elle est prête à se réveiller de sa narcose et à revendiquer son droit à la vie.
Il y a toujours une alternative au suicide.
L’abondance de matière et de richesse a, durant une période de quelques décennies, notamment durant les Trente Glorieuses, assuré l’élévation spectaculaire du niveau de vie d’un nombre toutefois réduit de personnes dans un nombre encore plus réduit de pays.
Mais il ne faut jamais oublier deux choses.
Premièrement: sous la poussée du nihilisme néolibéral, l’orgie consumériste occidentale s’est très bien accommodée du fait que la moitié de la planète crevait de faim en parallèle, et que des pays entiers étaient livrés à la guerre civile et aux massacres de masse pour permettre l’abondance de la came justement.
Deuxièmement: le modèle consumériste occidental a broyé la presque totalité de l’écosystème mondial et a accumulé une dette financière et écologique qui pèsera pour des siècles sur les épaules des générations à venir. Nous sommes ainsi les premières générations dont l’organisation sociale les aura poussés à voler leurs propres enfants, à considérer leur avenir et leur santé avec la plus invraisemblable désinvolture.
A ce prix-là, il ne manquerait plus que l’orgie ait été décevante.
La fête est finie
Sauf que la fête est finie.
Notre démocratie néolibérale est aujourd’hui encagée dans deux impasses.
La première est que du fait de ses dérives transgressives sans fin et de sa guerre de tous contre tous, le néolibéralisme politique et culturel rend la cohabitation de plus en plus impossible dans une société littéralement atomisée et livrée à la seule concurrence des intérêts particuliers de chacun.
La deuxième impasse est que le règne du dieu-Marché ne peut tout simplement pas survivre à un défaut de croissance éternelle.
Des cerveaux de moins en moins «disponibles»
Enfin, un problème nouveau se pose au Système néolibéral. Un problème qui concentre et autorise toutes les espérances. Car fort heureusement, le modèle nihiliste du néolibéralisme n’est pas parvenu à assécher totalement les «gisements culturels», à abolir l’homme, ce qui montre que l’humanité n’a pas encore jeté l’éponge.
Tous les mouvements dissidents, alternatifs ou antisystèmes qui se développent massivement aujourd’hui démontrent même que cette humanité arrive à saturation devant le vide glacé et l’absence totale de sens qu’impose aujourd’hui aux peuples les sociétés néolibérales. Dans la plupart des nations occidentales, les populations sont écœurées par la farce d’une démocratie d’opérette qui suinte l’indécence de tous ses pores.
L’effarante tentative d’ingénierie sociale globalisée pour abolir l’homme, le faire régresser, lui arracher sa dignité, sa spiritualité et pour finir son humanité afin de le reconfigurer selon les besoins du Marché est un cuisant échec.
Alors les néolibéraux peuvent bien rêver de transhumanisme et de singularité, de googeliser le monde et les hommes, les «cerveaux disponibles» pour le grand formatage le sont de moins en moins.
L’homme résiste, petitement, maladroitement, malgré le poids écrasant de la Machine, ou peut-être même à cause de ce poids.
L’humanité s’ébroue.
Elle est prête à se réveiller de sa narcose et à revendiquer son droit à la vie.
Il y a toujours une alternative au suicide.
Épilogue
Après ce détour un peu bavard sur le fiasco libéral, nous revenons sans transition dans l’actu, le Big Now, ou se construisent déjà des échéances spectaculaires pour le Système néolibéral à la sauce atlantiste.
En novembre prochain, ce sera donc le grand affrontement entre le bulldozer Trump (s’il n’est pas assassiné avant) et Killary (la va-t-en-guerre de Wall Street).
Et quel que soit le résultat, il y a fort à parier que l’Amérique à venir sera encore un peu plus ingérable, un peu plus paralysée, un peu plus impuissante qu’aujourd’hui, avec même des risques de guerre civile et de dislocation selon les options choisies par l’establishment pour conserver le contrôle du processus.
Or nous devons avouer que ce chaos washingtonien en gestation nous réjouis au plus haut point.
La présidentielle US telle qu’elle se profile représente en effet un évènement hautement explosif pour la cohésion de l’Empire. Le petit Obama a beau réaffirmer sans cesse la puissance supposée des Etats-Unis et son exceptionnalisme, ses mots apparaissent tragiquement déconnectés de toute réalité et relève du fantasme monomaniaque (16). En réalité, l’Amérique du Nord est en train de s’effondrer sur elle-même au terme d’une histoire aussi courte que vulgaire.
Or nous l’avons toujours pensé, la chute des USA en tant qu’axe central autour duquel gravite toute la machinerie du Système néolibéral actuel sera le détonateur d’une implosion généralisée du Système avec, dès lors, la possibilité d’un changement réel de paradigme.
L’occasion, enfin, de nous ressaisir
L’occasion rare pour les peuples de reprendre leur destin en mains, de tirer la chasse sur le néolibéralisme et sa globalisation mercantile mortifère, d’en finir une fois pour toute avec ce Système lugubre qui n’est en rien réformable et dont il convient de tout rejeter en bloc, absolument tout, pour ne plus sentir sur notre nuque le souffle de la bête, et pouvoir enfin œuvrer à l’édification d’une société totalement nouvelle, libre, égalitaire et décente.
Les idéologues du Système, son clergé de «Surmorts», objecteront bien sûr en ricanant qu’il ne s’agit là que d’utopie, de rêverie, car leur ruse la plus pernicieuse est bien de faire croire qu’il n’y a pas d’alternative (le fameux TINA : There is no alternative) au modèle consumériste actuel. C’est l’un de leurs mensonges fondateurs.
Mais en réalité, la soumission au dieu-Marché du néolibéralisme globalisé, à sa démocratie représentative faussaire et à son hystérie marchande et technologique qui conduit à l’effacement de notre humanité, ne sont pas une fatalité.
D'autres modèles de sociétés alternatifs existent, fondés sur la collaboration, la sobriété heureuse, la gratuité, l’échange, le partage, l’entraide, la bienveillance, le bien commun, le «donner, recevoir et rendre».
Le changement est nécessaire mais aussi possible, et l’Histoire va peut-être nous fournir bientôt, enfin, une occasion de nous ressaisir.
Mis en ligne par entrefilets.com le 10 mai 2016
En novembre prochain, ce sera donc le grand affrontement entre le bulldozer Trump (s’il n’est pas assassiné avant) et Killary (la va-t-en-guerre de Wall Street).
Et quel que soit le résultat, il y a fort à parier que l’Amérique à venir sera encore un peu plus ingérable, un peu plus paralysée, un peu plus impuissante qu’aujourd’hui, avec même des risques de guerre civile et de dislocation selon les options choisies par l’establishment pour conserver le contrôle du processus.
Or nous devons avouer que ce chaos washingtonien en gestation nous réjouis au plus haut point.
La présidentielle US telle qu’elle se profile représente en effet un évènement hautement explosif pour la cohésion de l’Empire. Le petit Obama a beau réaffirmer sans cesse la puissance supposée des Etats-Unis et son exceptionnalisme, ses mots apparaissent tragiquement déconnectés de toute réalité et relève du fantasme monomaniaque (16). En réalité, l’Amérique du Nord est en train de s’effondrer sur elle-même au terme d’une histoire aussi courte que vulgaire.
Or nous l’avons toujours pensé, la chute des USA en tant qu’axe central autour duquel gravite toute la machinerie du Système néolibéral actuel sera le détonateur d’une implosion généralisée du Système avec, dès lors, la possibilité d’un changement réel de paradigme.
L’occasion, enfin, de nous ressaisir
L’occasion rare pour les peuples de reprendre leur destin en mains, de tirer la chasse sur le néolibéralisme et sa globalisation mercantile mortifère, d’en finir une fois pour toute avec ce Système lugubre qui n’est en rien réformable et dont il convient de tout rejeter en bloc, absolument tout, pour ne plus sentir sur notre nuque le souffle de la bête, et pouvoir enfin œuvrer à l’édification d’une société totalement nouvelle, libre, égalitaire et décente.
Les idéologues du Système, son clergé de «Surmorts», objecteront bien sûr en ricanant qu’il ne s’agit là que d’utopie, de rêverie, car leur ruse la plus pernicieuse est bien de faire croire qu’il n’y a pas d’alternative (le fameux TINA : There is no alternative) au modèle consumériste actuel. C’est l’un de leurs mensonges fondateurs.
Mais en réalité, la soumission au dieu-Marché du néolibéralisme globalisé, à sa démocratie représentative faussaire et à son hystérie marchande et technologique qui conduit à l’effacement de notre humanité, ne sont pas une fatalité.
D'autres modèles de sociétés alternatifs existent, fondés sur la collaboration, la sobriété heureuse, la gratuité, l’échange, le partage, l’entraide, la bienveillance, le bien commun, le «donner, recevoir et rendre».
Le changement est nécessaire mais aussi possible, et l’Histoire va peut-être nous fournir bientôt, enfin, une occasion de nous ressaisir.
Mis en ligne par entrefilets.com le 10 mai 2016
4 «La double pensée, retour sur la question libérale», Jean-Claude Michéa
5 Regis Debray : «La frontière n’est pas du tout la fermeture angoissante. La frontière est une marque de modestie. Je ne suis pas partout chez moi. Il y a une ligne au-delà de laquelle il y a d’autres personnes que je reconnais comme autres.»
13 En référence à deux expositions d’artistes contemporains qui avaient là encore heurté le bon sens de gens ordinaires immédiatement taxés de dangereux extrémistes réactionnaires par le clergé médiatique libéral
mercredi 18 mai 2016
L’INCENDIE DE L'ALBERTA, PARABOLE DE L'EPOQUE
source
L’incendie gigantesque qui sévit en Alberta, effet du réchauffement climatique, a frappé la ville qui n’y croyait pas.
Il était une fois un monde très riche, qui ne voulait pas cesser d’accumuler des richesses, quel qu’en soit le prix pour la nature.
Dans un pays parmi les plus riches, le Canada, on avait trouvé des sables bitumineux, une source de pétrole qui semblait inépuisable. Mais pour extraire le pétrole de ces sables, il fallait utiliser beaucoup d’eau, beaucoup de produits chimiques, beaucoup d’énergie, couper des forêts, entasser des déchets toxiques... Les écologistes et les autochtones de la région concernée, l’Alberta, avaient beau dire que c’était un désastre pour la nature, que cela émettait énormément de gaz à effet de serre, les exploitants n’en avaient cure. La cupidité était leur guide.
A Fort McMurray, autrefois un poste perdu dans la taïga, une ville a commencé à grandir démesurément, l’exploitation de sables à se développer au moyen de machines gigantesques, des lacs de déchets toxiques à se multiplier, les maladies à se développer chez les autochtones vivant en aval, les émissions de gaz à effet de serre du pays à augmenter sans cesse.
Le gouvernement s’en moquait : pour accroitre encore la richesse apparente du pays, il soutenait sans faillir l’exploitation des sables bitumineux, allant même jusqu’à se retirer du traité international sur le changement climatique.
Mais ignorer la réalité ne suffit pas à la faire disparaitre. Le changement climatique se déploie sur la planète, et les régions les plus proches du pôle Nord sont les plus affectées par le réchauffement. Ainsi, au printemps 2016, la température moyenne dans l’Alberta était bien plus élevée que la normale saisonnière : 30°C au lieu de 15°C ! Des conditions idéales pour que se déclenchent des feux de forêts.
Ceux-ci ont rugi, créant un brasier d’enfer autour de la ville des sables bitumineux, la ville qui croyait pouvoir ignorer le changement climatique, la ville qui croyait que l’on pouvait détruire la nature impunément.
Cent mille personnes ont fui, une ville est détruite. Comme Pripiat près de Tchernobyl, abandonnée après l’accident qui ne devait jamais arriver, voici Fort McMurray, brasier fumant, maisons calcinées, torche irradiante, symbole de la folie de la cupidité et de l’aveuglement.
FORT MCMURRAY, LE TROU DU CUL DU MONDE.
source
Le trou du cul du monde
Je m’excuse à l’avance, il est possible que la poussière ne soit pas encore retombée.
Avant de lire ces quelques lignes, il faut mettre de coté la sensibilité et la compassion pour les gens qui ont perdu leur maison. Sans coeur, aussi immonde que ça puisse paraître, il faut faire abstraction de ces vies chamboulées. Il y a parfois des événements ironiques dans la vie. Des situations qui nous permettent de penser autrement, en perspective, à quelque chose de plus grand.
Un court séjour chez Maurice
J’ai déménagé à Fort McMurray en 2009. Comme plusieurs autres canadiens, je cherchais un moyen facile de faire de l’argent. Un salaire de 100,000$ par année, c’était attrayant pour un jeune de 19 ans tout juste gradué du Cégep. « Je vais placer de l’argent de coté, payer mes dettes d’études, et je reviendrai au Québec avec un gros char ». C’est la même pensée qui traverse l’esprit de milliers de jeunes canadiens à chaque année. Il n’en fallait pas plus pour nous attirer! Mon ami et moi étions déjà en route pour le trou du cul du monde: Fort McMurray.
Jamais auparavant je n’avais vu autant de pick-ups! Que ce soit dans les rues, les entrées de maisons ou le stationnement du Walmart, il y en avait partout. À Fort McMurray, il y a plus de concessionnaires que d’organismes communautaires, de bibliothèques et d’écoles mis ensemble.
On se le répétait, bientôt, nous allions être riche! Quelques nuits difficiles à dormir dans notre vieille caravan, le temps de trouver un emploi… et le tour est joué!
Quelques jours plus tard, nous avions trouvé une chambre à louer chez une famille de Québécois. Le visage de Fort McMurray, c’était cette famille de la Beauce. Ils avaient déclaré faillite, ils étaient sans ressources et sans moyens. Pour eux, avec leurs deux adolescents, « Le Mac » c’était leur dernier espoir.
Ces Beaucerons n’avaient aucune éducation, toute la famille était obèse, à chaque soir ils commandaient du poulet frit ou de la pizza. Les caisses de Coca-Cola et de Molson Canadian faisaient partie intégrante de la décoration. Bref, une famille colonisée, des truckers de Fort. Mc.
Maurice nous demandait 1000$ pour une petite chambre avec deux lits simples. 1 pied séparait les deux lits, on s’entendaient péter. Ça allait faire la job! Une maison fièrement achetée 500,000$ par les propriétaires, payé par les chambreurs, nous étions 8! Maurice nous l’avait bien dit: « Le Québec c’est de la marde, jamais j’aurais pu m’acheter une grosse cabane là-bas ».
Même après une faillite, c’est très facile de trouver un prêteur dans le Mac, surtout avec un revenu de 100,000$ pour chauffer un camion ou ramasser les ordures.
Maurice allait faire fortune, il était entrain de construire 4 nouvelles petites chambres au sous-sol pour les prochains arrivants, il planifiait s’acheter une deuxième maison. Maurice avait des rêves.
Ça ne faisait même pas un mois que nous étions là qu’il augmenta notre loyer à 1,200$ par mois. Si l’on refusait, nous devions quitter le lendemain matin. C’est ce qu’on a fait, salut mon cher Maurice!
Une grosse Mustang flambette
À Fort McMurray, il fait toujours gris, les gens boivent beaucoup d’alcool. Cette ville connaît un grave problème de prostitution, de jeu et de drogue. Pour la plupart, des gens peu éduqués qui veulent s’enrichir rapidement, c’est un mélange toxique pour n’importe quelle société. En investissant dans cette ville éloignée, le Canada participe au génocide intellectuel d’une nation.
Comme au Far West, les hommes se promènent en pick up neuf, le menton bien haut, c’est ça la vie. Il y a souvent des bagarres, les gens consomment beaucoup de drogue pour oublier l’ennui, beaucoup de drogue.
Lorsque j’ai commencé à travailler comme agent de sécurité sur une mine, tout le monde avait un seul but: faire fortune sans études en se renseignant le moins possible sur le monde autour. La sélection naturelle renversée.
Fort McMurray, c’est le paradis de l’individualisme et de la bêtise. Jean Chrétien nous l’a dit, c’est ça le plus meilleur pays au monde.
Je me sentais comme dans un livre de Orwell, une société sans culture, sans personnalité, un objectif commun: dépenser son argent dans les bars, les voitures et sur les tables de Blackjack du Boomtown.
C’est là-bas que j’ai rencontré Ashley, une trentenaire de l’Ontario venue habiter à Fort McMurray pour payer ses dettes exubérantes. Elle était là depuis seulement 4 mois, sa première décision fut d’emprunter 50,000$ pour s’acheter une Mustang de l’année. Flambette! Comment vas-tu payer tes dettes Ashley? « Pas grave, avec mon gros salaire, je vais finir par tout payer ».
Le trou du cul du monde
Ces rencontres et constatations furent des événements catalyseurs pour moi. Quant à ma perception de l’économie et de la société canadienne. Je ne me suis jamais senti autant différent, autant Québécois.
Dernièrement, j’ai entendu des politiciens dire à quel point nous devrions être fiers de Fort McMurray. Non, il y a aucune raison d’être fier de Fort McMurray. Il m’est arrivé souvent de penser que cet endroit allait exploser, être abandonné ou même bruler avec tout ce pétrole qui lui sortait par les oreilles.
Non seulement, c’est une tragédie environnementale, mais c’est aussi un poison pour le progrès humain. Lorsqu’on investit dans le pétrole, on détruit des milliers d’âmes créatives. Au lieu d’étudier et participer au progrès, des milliers de jeunes vont mourir là-bas; pour quelques dollars additionnels. Le coût de renonciation pour le Canada est énorme. Ça prend de l’imagination et du cran pour faire autrement.
Nous l’aurions peut-être notre grande innovation, notre grand succès commercial, notre voiture électrique, si ce n’était pas du pétrole. Nous l’aurions peut-être notre indépendance énergétique, notre belle utopie scandinave.
Lorsqu’on fait le choix facile du pétrole, au nom de la productivité, au nom du développement économique, on enterre des futurs scientifiques, on intensifie notre déclin. L’ère des hydrocarbures est révolue au moment où nous devrions investir dans l’économie du 21ième siècle.
Après ce feu, pourquoi reconstruire? Pourquoi réinvestir des milliards de dollars à Fort McMurray. Selon plusieurs études dont celle du National Energy Board, les ressources pétrolières seront totalement épuisés en 2050 et le baril de pétrole restera sous la barre de 100$ jusqu’en 2040. C’est un pari trop risqué.
Fort McMurray n’amène aucune innovation, aucun progrès social, aucune matière grise. Fort McMurray enrichit les concessionnaires et les compagnies de construction, tout cet argent est jeté à la poubelle.
Ce feu remet les choses en perspectives. Je vais vous le dire franchement, Fort McMurray, c’est le trou du cul du monde.
Reconstruire, pourquoi?
Aussi cru que ça puisse paraître, je ne reconstruirais rien, je laisserais le courant naturel des choses faire son oeuvre, le feu de Fort McMurray, c’est l’opportunité de nous sortir des hydrocarbures. Pourquoi dépenser plusieurs milliards, encore, dans une industrie destinée à mourir? Pour stimuler la productivité et le PIB par la dette? Pour créer des emplois dans la construction? Pour épuiser une ressource de moins en moins rentable dans un endroit qui n’existera plus dans 40 ans?
Dans un monde idéal ce serait le moment de recommencer sur de nouvelles bases, dans un monde meilleur il serait temps de relocaliser et former ces gens dans l’économie du 21ième siècle. Ce feu est une grande ironie.
Monsieur Trudeau, vous avez tout un défi devant vous. Faire le choix facile de l’économie du pétrole et perpétuer cette tradition toxique. Ou alors faire le choix du progrès humain. La balle est dans votre camp.
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