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samedi 26 novembre 2016

FIDEL CASTRO : " ce que j'ai fait personne d'autre ne l'a fait"

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Fidel Castro le Lider Maximo est mort

La dernière star politique du 20 ème siècle est décédée. Fidel Castro encensé par les uns, détesté par les autres a une place particulière dans l'histoire contemporaine en tant que leader d'un petit pays révolutionnaire qui a eu un rôle exceptionnel hors de ses frontières et qui a transformé durablement la société cubaine avec des succès incontestables dans l'éducation, la santé. Régis Debray a caractérisé "le castrisme, une action empirique et conséquente, qui a rencontré le marxisme sur son chemin, comme sa vérité".

Les années de formation
Le père Castro, émigré espagnol pauvre à la fin du 19ème siècle, s'est constitué une finca, grosse exploitation agricole dans le Cuba dominé par les banques américaines qui possèdent 80% de la production de sucre, qui ont le monopole dans les chemins de fer, l'électricité, le téléphone.
Le fils nait avant la grande crise mondiale de 1929, reçoit une éducation au collège puis au lycée jésuite, avec l' éthique, l'anti-américanisme qui caractérisent les jésuites cubains des années 30.
Grand sportif, étudiant il obtient ses diplômes en droit et sciences sociales à l'université de la Havane à la fin de la seconde guerre mondiale.
Il adhère à la nouvelle ligue anti-impérialiste des étudiants latino-américains, il fonde le mouvement étudiant pour l'action dans les Caraïbes, il préside la fédération des étudiants de l'université.On remarque déjà ses talents d'orateur.
En 1948 il participe à l'insurrection du Bogotazo en Colombie.
Il lit Marx Engels Lénine.
En 1950 il est docteur en droit après s'être spécialisé dans la législation du travail et le droit diplomatique. Il devient avocat au bénéfice des plus pauvres.
En 1951 il se présente aux élections pour le Partido Orthodoxo et il crée en son sein l'Action radicale orthodoxe.
La lutte contre Batista
En 1952 à la suite du coup d'état de Fulgencio Batista, Castro exige l'arrestation du dictateur et entre dans la lutte clandestine et la préparation d'un projet révolutionnaire. Après l'attaque de la caserne de la Moncada et l'assaut repoussé par les troupes gouvernementales, Castro est arrêté et lors de son procès il dénonce la misère des cubains et propose un programme politique avec le partage des terres, le logement, la santé, l'éducation pour les plus pauvres, la nationalisation des trusts, la création des coopératives agricoles. La publication de "l'histoire m'absoudra" fera connaitre ce discours aux références nombreuses : Rousseau, la république romaine, St Thomas d'Aquin, Martin Luther, Montesquieu, José Marti.
Il est condamné à 15 ans de prison, sur l'île des Pins, avec 20 de ses compagnons. C'est pendant sa détention qu'une véritable école révolutionnaire sera mise en place, avec pragmatisme, formation intellectuelle et entrainement physique au programme. Une loi d'amnistie en mai 1955 le fera sortir de prison. Il crée alors le Mouvement révolutionnaire du 26 juillet. Il s'exile au Mexique, rencontre Che Guevara médecin argentin, continue à s'entrainer à la lutte avec ses compagnons, collecte des fonds au USA.
Quittant le Mexique, il va à bord du Granma, avec 81 hommes armés, débarquer à Cuba, et mener à partir de décembre 1956 la guérilla dans la Sierra Maestra. 2 années de lutte contre le régime de Batista, mais aussi 2 années de discussion programmatique pour l'après Batista et la création d'une administration civile du territoire libéré au fur et à mesure.
Nuevo Cuba
En fin 1958 les troupes castristes balayent le pays d'est en ouest, les populations se ralliant à elles. Et le 8 janvier 1959 Fidel Castro est à la Havane où il installe le nouveau pouvoir en mettant en place une vie spartiate des différents protagonistes. Le Nuevo Cuba est né. Se retrouve au pouvoir une majorité de ministres réformistes, le M-26-7, le parti de Castro apparait à peine. Très vite le gouvernement mis en place se trouve face à une double pression, celle des cubains qui cautionnent les messages politiques du M-26-7 et celle des castristes. Le Parti communiste cubain est ensuite associé au pouvoir. Le gouvernement est remanié, y restent quelques indépendants. L'effervescence révolutionnaire côtoie la justice révolutionnaire qui punit lourdement petits et grands tenants de l'ancien régime. Un million de cubains choisit l'exil. Les réformes annoncées sont appliquées : baisse des loyers, contrôle des prix, salaire minimum, réforme agraire, nationalisations des entreprises américaines, de la santé, construction de logements cédés en usufruit à chaque famille. Des comités de défense de la révolution sont créés.
Dans le pays d'anciens compagnons de Castro se rebellent contre le nouveau cours pris par la révolution ; l'église catholique manifeste et regroupe des centaines de milliers de personnes pour la liberté et la propriété. Des groupes de rebelles se forment.
Fidel Castro avait fait un voyage d'explications aux USA auprès des médias, des associations amies, mais le gouvernement américain ne peut tolérer le nouveau régime jugé trop proche des communistes et les nationalisations heurtent le business.
Le rapprochement avec l'Union Soviétique a lieu sur la base du "Cuba si, Yanquis no" alors qu'en octobre 1960 les premières mesures du "bloqueo" sont prises par les Etats-Unis qui ferment leur ambassade en janvier 1961.
En avril de la même année c'est l'invasion américaine de la Baie des cochons qui échoue avec la mobilisation de l'île contre "l'impérialisme américain". 1961 c'est aussi l'année de l'éducation cubaine avec la grande "ley de nacionalizacion general y gratuidad de la ensenanza" et l'affirmation dans le domaine artistique : " nous apprécierons toujours la création au travers du prisme du cristal révolutionnaire".
Ernesto Guevara avocat de la planification économique proclame : " l'homme socialiste doit travailler pour la société et non pour un gain personnel". L'agriculture devient la priorité des priorités pour nourrir la population, en comptant sur les propres forces de l'île.
En octobre 1962 c'est la crise des missiles au cours de laquelle le monde a bien cru au déclenchement d'un conflit nucléaire, les soviétiques ayant installé des rampes de lancement de missiles nucléaires. Grâce à l'intervention des 2 K Kennedy et Khrouchtchev, la crise s'achevera.
1962-1989 Cuba état communiste
Même si Castro a toujours jugé le modèle soviétique trop bureaucratique, l'économie et la politique cubaine s'inspirent largement des recettes de l'Union soviétique. Dans l'agriculture, le secteur d'état représente 63% des terres cultivées. En octobre 1965 Castro crée le PCC parti communiste cubain. En occident des listes de centres de détention à régime sévère pour les opposants, circulent. En août 1968 Castro approuve l'invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du pacte de Varsovie. Ce qui n'empêche pas les 2 dirigeants européens le suédois Olof Palme et l'allemand Willy Brandt de reconnaitre en 1969 les avancées sociales de la révolution castriste notamment dans l'éducation et la santé.
En 1970 la zafra, la récolte de la canne à sucre, devait dépasser le chiffre record de 10 millions de tonnes ; elle se terminera par un chiffre inférieur de 8,5 millions.
En 1972 Cuba rejoint le Conseil d'assistance économique mutuelle qui regroupe l'URSS et les pays communistes d'Europe de l'est.
En 1976 Castro à la tête du conseil d'état cumule les fonctions de chef de gouvernement et de chef d'état. Mais contrairement à l'Union Soviétique, aucun culte de la personnalité, pas une école, pas une usine, pas une rue, pas un hôpital, ne porte son nom. Il n'y a pas de statue à son effigie, pas de portrait officiel.
A l'été 80 une crise migratoire forte touche Cuba avec les marielitos qui veulent rejoindre les Etats-Unis. Des actions terroristes sont menées par des exilés cubains enrôlés par la CIA.
En 1976 pour desserrer quelque peu une économie très corsetée, le gouvernement autorise les vendeurs ambulants et en 1980 on voit poindre une libéralisation des marchés agricoles pour l'amélioration de l'approvisionnement alimentaire des cubains.
En 1986 une campagne est menée pour rectifier "les erreurs et déficiences" du système.
En juillet 89 le général Ochoa, le colonel Tony de la Guardia sont condamnés à mort pour un trafic de drogue à grande échelle et exécutés. Fidel Castro accuse le coup, car il s'agit là de la trahison de très proches responsables.
1962-1989 Cuba leader du tiers-monde
Dans cette période qui voit Cuba se développer en tant que pays communiste, Fidel Castro fait de l'île un des leaders du tiers-monde, des pays pauvres et en voie de développement.
Des guérillas se développent en Afrique, au Congo, en Amérique latine, au Pérou, en Bolivie, en Argentine. Le rôle de Cuba et de Che Guevara (abattu en 1967) est attesté dans l'ensemble de ces mouvements.La Havane devient le siège de l'organisation tricontinentale de solidarité des peuples, de l'organisation latino-américaine de solidarité.
En 1972 Cuba ratifie la convention internationale sur l'élimination de la discrimination raciale. En 1974 Fidel Castro soutient en Angola le mouvement populaire de libération MPLA face à l'UNITA soutenu par les USA et l'Afrique du sud, le pays de l'Apartheid. Il a apporté son aide à la révolution sandiniste au Nicaragua. En 1979 à la Havane se tient le sommet du mouvement des non-alignés. En 1985 c'est la conférence internationale sur la crise de la dette du tiers-monde, toujours à la Havane.
1989-2005 la période spéciale
En 1989 Fidel Castro reçoit Mikhaïl Gorbatchev. Il est très dubitatif sur le nouveau cours donné par ce dernier à la transformation de l'URSS et de ses alliés. La chute du mur de Berlin, l'exécution de Ceaucescu en Roumanie, la fin de la révolution sandiniste, la fuite d'Ethiopie de Mengistu, l'effondrement de l'URSS, vont provoquer un véritable séisme à Cuba.
En 1990 Castro ouvre" la période spéciale en temps de paix", pour faire face à l'urgence avec la défection dramatique du bloc de l'est, de ses exportations et de ses importations.. De 1992 à 1994 le PIB cubain chute de 35%, les salaires de 25%, la consommation de 27%. Des cultures hors-sol sont pratiquées pour nourrir les villes. Les cubains ont faim, les restrictions tous azimuts touchent le pays.
En 1994 la fuite des balseros sur des embarcations de fortune montre une situation très dégradée, voire catastrophique.
Aux Etats-Unis la loi Torricelli en 92, puis la loi Helms-Burton en 96 accentuent, aggravent le bloqueo. En 97 une série d'attentats à la bombe touche l'île.
Fidel Castro trouve une nouvelle alliance économique en se tournant vers le Vénézuela de Chavez ( du pétrole contre des médecins et des enseignants) et la Chine communiste, pour remplacer l'URSS défaillante.Les énergies renouvelables sont appelées à la rescousse avec le solaire. 200 instituts scientifiques sont boostés pour la recherche biologique, pharmaceutique, le génie génétique. Une université des sciences informatiques est lancée, des produits pharmaceutiques sont créés.
Parallèlement, ces années voient par la volonté de Fidel Castro des changements politiques : en 1992 les premières élections municipales au suffrage universel direct ; en 93 les premières législatives au suffrage universel pour la moitié de l'Assemblée nationale. Au plan économique, en 93, les marchés libres paysans sont autorisés, le travail pour son propre compte est toléré.L'ouverture de l'économie aux investissements étrangers est actée. Tous ces changements pour éviter le naufrage et permettre une amélioration de la vie quotidienne des cubains, tout en maintenant le régime né de la révolution.
En janvier 1998 le pape Jean-Paul II est en visite à Cuba. En 2000 Castro rencontre le président Clinton à un sommet de l'ONU. En 2002 il invite l'ancien président Carter à la Havane mais le président G W Bush inscrit Cuba sur la liste noire des pays dangereux.
Alors que Fidel Castro a prédit une crise économique mondiale provoquée par la spéculation, les récessions, le saccage de l'environnement, en mars 2005 il annonce la fin de la période spéciale avec des résultats économiques meilleurs que prévus. Ce qui ne l'empêche pas de critiquer vertement les nouveaux riches parmi les cadres dirigeants du parti et de l'état. L'année suivante il crée avec Chavez, Evo Morales pour la Bolivie, l'ALBA Alternativa Bolivariana para las Americas.
Une succession familiale
Le 26 juillet 2006 lors de la commémoration de l'assaut de la Moncada il est pris d' "une crise intestinale aigüe avec saignements permanents". Le 31 juillet il organise une délégation de pouvoirs à son frère Raul Castro. Il va perdre jusqu'à 18 kg !
En 2008 Raul Castro devient président du Conseil d'état.
Fidel continuera à alimenter la politique de son pays avec ses "Reflexiones". Il avait dit :" nous avons besoin d'efficacité, de rentabilité. Nous avons démontré que nous ne sommes pas de bons gestionnaires". En bon praticien, pragmatique. Il a aussi écrit ses Mémoires.
"Le tacticien, le praticien" a maintenu officiellement l'essentiel du socialisme cubain. Alors que le blocus nord-américain sévissait, l'état a ouvert l'économie pour sa survie, aux investissements étrangers, en préservant l'éducation, la santé et l'armée. Fidèle à son objectif de créer et maintenir contre vents et marées un Cuba révolutionnaire et socialiste, Fidel Castro peut dire :" ce que j'ai fait personne d'autre ne l'a fait".

Il est décédé.

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